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Léon-Pierre KOPP (1900 - 1964 )
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La presse régionale,
où le nom de Pierre KOPP apparaît...

Journal Le Lorrain, Mardi 25 - Mercredi 26 décembre 1945

Un homme de devoir et d’action
LE LIBÉRATEUR du camp de Woippy


C’est un homme comme beaucoup d’autres, un de ces hommes de chez nous, modeste, travailleur, bon père de famille, qui a ses qualités et ses défauts comme chacun de nous. Pierre Kopp, 45 ans, habite Woippy où la guerre lui a valu d'être sinistré à 100 %. Il est père de 5 enfants et était ouvrier d'Etat à l'Arsenal I à Metz au début des hostilités. C'est aussi un ancien sportif, un ancien champion de cross du Racing de Strasbourg.
Après avoir participé au repli de 1940, tout d'abord à Mourmelon, puis à Limoges et enfin la Dordogne, il rentre à Woippy au début d'août 1940, refuse de travailler pour l'armée allemande et accepte un emploi dans une entreprise de construction qui, en 1941, participe à la construction des Hobus-Werke. En 1943, il assiste à la formation du fameux camp de Woippy et il est à se demander encore aujourd'hui par quelle chance il a été servi pour ne pas y avoir été lui-même comme pensionnaire, car il a fait mieux que résister. Combien de prisonniers de guerre lui doivent la liberté ? Passons.
Chez Hobus, il devient chef des chargements et déchargements du matériel, ce qui le mit quotidiennement en contact direct avec quelques-uns des 700 à 800 internés politiques qui sont astreints à ce travail, et plus particulièrement avec les détenus Sinteff et Pfeiffer qui sont occupés au bureau du camp. Et c'est ainsi que beaucoup peuvent correspondre et recevoir des lettres ou des journaux, voire des colis de ravitaillement à la barbe des SS. Et ce qui est encore plus osé, Kopp amène des internés jusqu'à son domicile où rendez-vous a été donné aux familles. Des mois passent, le guerre se prolonge mais les nouvelles meilleures de jour en jour. Chacun est sur ses gardes et Kopp peut-être plus que tout autre.
Le 31 août 1944, notre brave remarque une certaine nervosité au corps de garde, car le grondement du canon s'est singulièrement rapproché. Il trouve une excuse pour traîner dans les parages du camp et passer une partie de la nuit avec les gardes dont il a acquis la confiance. Vers 2 heures du matin, le commandant tente d'entrer en liaison directement avec l'usine. On ne répond plus. Il part à Metz à bicyclette chercher des ordres.
Pendant ce temps, Bachmann l'odieux dresseur de chiens, rafle bijoux et objets de valeur. Peu après, le commandant est ramené en voiture et annonce : « On part dans un quart d'heure », et donne comme dernière consigne de piller les valises des internés. Pour Kopp, c'est le moment d'être vigilant. Caché derrière une armoire de la baraque des gardiens, il a compris.
La mitraillette se fait entendre, mais c'est uniquement une feinte pour bien laisser croire qu' « on » est toujours là. Et le commandant s'en va le dernier, laissant allumé toutes les lumières.
C'est le moment que Kopp a attendu. Il pénètre dans le camp : « Debout les gars, brisez les volets et les portes ». Et les 540 internés sont bientôt dehors, fous de joie. Serrures et cadenas sont brisés, les cellules ouvertes et le terrible chien de garde abattu à la mitraillette, cependant que Sinteff, Pfeiffer et les commandants Varon et Poirier se mettent au devoir de rendre les papiers individuels retrouvés à leurs camarades. Cela se passait à 3 h 15 et bientôt, comme une nuée de moineaux, les internés s'étaient envolés.
Mais l'avance des alliés était stoppée et l'on vit revenir, penauds, quelques Allemands. Le 3 septembre, le commandant revenait avec plusieurs gardiens au camp de Woippy. Ils fouillèrent partout, mais ne trouvèrent plus âme qui vive. Quel pouvait être le salopard qui avait fait partir tout le monde? Les soupçons se portèrent naturellement sur Kopp, mais il put se disculper ! Pas pour longtemps, car le lendemain la Gestapo faisait une perquisition à son domicile. Il sortait du café Natier quand M. Copeaux, l'instituteur, l'avise de ce qui se passait. Que faire? Il se camoufle dans la campagne et, précisément, en ce 4 septembre, les teutons font évacuer Woippy par la population civile. Des affiches sont apposées sur les murs ; elles offrent 300 RM. de récompense à qui fera découvrir Kopp qui, entre-temps, a pu se réfugier à Metz, place St-Nicolas, chez sa vieille mère.
Mais il s'est trouvé encore un traître au dernier moment. Et le libérateur des internés de Woippy est arrêté le 29 octobre. Son compte est bon et il ne se fait pas d'illusions sur ce qui l'attend. A la Maison d'Arrêt de Metz, il attend anxieusement et c'est une agréable surprise qui l'atteint le 15 novembre. Il est libre. Comment ? Pourquoi ? Kopp ne cherche pas à comprendre ! Aussitôt dehors ; il apprend avec plus de précision ce qui se passe et se range aux côtés des FFI, tenant à apporter son concours jusqu'au bout pour la libération de la Patrie.
Et M. Kopp, conscient d'avoir accompli son humble devoir retourne à ses occupations. Mais à Woippy, il retrouve un logis complètement anéanti dans les cendres duquel se sont confondues celles du drapeau de l'Union Jeanne-la-Lorraine, pieusement conservé jusqu'alors.
Notre compatriote est maintenant rentré dans le rang et ne prétend à aucune reconnaissance, estimant modestement qu’il a fait ce que d’autres auraient pu faire aussi bien que lui. Quant à nous, nous estimons que les pouvoirs publics ne devront pas oublier que cet homme a été le sauveteur de centaines de vies française. J.-E. A.

En avril 1963, à Metz-Nord, lors des travaux de l'autoroute,
on découvre un charnier « datant vraisemblablement de la dernière guerre ».

Journal Le Républicain Lorrain, Mercredi 10 avril 1963

Après la découverte du charnier de Metz-Nord, les organisations de déportés de la Résistance décident de porter plainte pour assassinats contre l'ancien chef de camp de Woippy.

On sait l'émotion soulevée à la suite de la découverte du charnier de Metz-Nord, au sein des organisations de déportés de la Résistance. Aussi, sur l'initiative de la F.N.D.I.R.P., réunie dimanche, l'ensemble des associations avait été invité à se regrouper hier soir, au Kursal, afin de déterminer approximativement la date où cette tuerie fut commise aux portes de Metz et de décider aussi de l'attitude à adopter à cet effet.
Autour de M. le Dr Burger, président de la F.N.D.I.R.P. et de M. Berthier, directeur de l'Office des anciens combattants, avaient pris place les représentants de l'U.N.A.D.I.F., de l'U.F.A.C., des A.G. juifs et P.G., des C.V.R. eut des anciens du camp de Woippy.

202 internés russes et lorrains le 28 août 1944
Un des anciens travailleurs libres du camp, M. Pierre Kopp fut entendu. Ce témoin vint apporter un témoignage assez précis sur la présence, dans la nuit du 28 août 1944, de 202 internés dont 150 Russes et une cinquantaine de Lorrains ( des maquisards de Longeville-lès-Saint-Avold ). Ceux-ci avaient été désignés à l'appel pour être dirigés vers une destination inconnue. Escortés par les S.S., ils disparurent.
S'agissait-il de ces malheureux, dont les ossements ont été découverts récemment ? On ne sait rien dans ce domaine. Seules des hypothèses ont été avancées. Un autre témoignage, celui de M. Reiss, révéla également la présence de quelques 150 prisonniers russes dans ce camp, précisant que trois d'entre eux avaient été enchaînés avant de disparaître. Des débris de chaînes furent d'ailleurs retrouvés lors des exhumations.
Il est également possible, suggéra un autre témoin, que les victimes aient été celles qui firent partie d'un convoi de 200 personnes venant de Compiègne entre le 17 et le 30 août, et probablement exterminées à Metz.
Ces organisations restent cependant dans l'incertitude quant à la nationalité de ces malheureux dont on retrouve, outre les débris de squelettes, des boutons verts d'origine russe.
« Il faudra demander des explications à Kirchdorfer, le chef du camp de Woippy » estimèrent les représentants des déportés.
Fritz Kirchdorfer a été en effet condamné le 17 novembre 1948, à 20 ans de travaux forcés et à 20 ans d'interdiction de séjour par le tribunal militaire de Metz. Ce criminel de guerre est aujourd'hui libéré et les Associations décidèrent de porter plainte pour assassinats auprès des Parquets français et allemands, réclamant sur commission rogatoire l'interrogation de l'ancien chef du camp.

« Il faut faire vite... »
Me Kédinger signala que si la prescription en France est de 15 ans, celle jouant en Allemagne est de 20 ans.
« Il est encore temps, dit-il, il faudra faire vite ».
M. Berthier, lorsqu'il sera ce matin en possession des éléments d'enquête fournis par M. Berland, commissaire de police, se mettra immédiatement en rapport avec le ministère des A.C. à Paris pour réclamer des instructions précises.
« Il n'est pas encore possible, dit-il, de savoir ce que nous ferons. Le côté nationalité n'a pas encore été déterminé, mais je vous assure que la mission du ministère des A.C. sera accomplie décemment ».
D'autres suggestions furent émises quant à la date des obsèques et le Dr Burger avancera celle du 28 avril prochain, consacrée à la journée des déportés. Mais là encore, il faudra attendre les précisions du ministre pour l'organisation d'une cérémonie militaire.
En attendant, les 45 caisses contenant les ossements resteront au hall mortuaire du cimetière de l'Est « car, précisa le représentant de l'Office départemental, s'il s'agit de prisonniers russes, il faudra que le Ministère prenne contact avec l'ambassade soviétique avant que certaines initiatives soient prises.
Il faudra également demander de poursuivre les sondages dans les environs du charnier, ceci dans le but d'apaiser la conscience des anciens déportés et d'élever une stèle à l'endroit où les corps furent découverts aux abords de l'autoroute. »

Collection Bibliothèque-Médiathèque de Metz)

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« Républicain Lorrain » du Dimanche 5 novembre 2006 en prévision
de l'inauguration de la Rue Pierre-KOPP prévue pour le samedi 11 novembre :

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