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Vente du 8 septembre 1832
(ADM / 353 U 53)

Par devant Me Gerquin et son collègue, notaires à la résidence de Metz, soussignés,
Fut présent
M. Joseph-Maximilien Ibrelisle, Docteur en médecine, demeurant audit Metz, rue du Four-du-Cloître.
Lequel par les présentes, reconnu et déclaré avoir volontairement vendu, cédé et abandonné en toute propriété avec garantie de trouble, dettes, hypothèque, éviction, aliénation et autres empêchements quelconques ;
À M. Charles Pécheur, conseiller à la Cour royale de Metz, demeurant en ladite ville, rue des Parmentiers, à ce présent et ce acceptant pour lui et pour De Jeanne Victoire Baudouin, son épouse, chacun par moitié ;
Une maison de maître divisée en deux bâtiments dont le principal est plus élevé que l’autre, est composé de plusieurs chambres, d’une petite cave, d’une bûcherie, écurie, poulerie, et autres dépendances, d’un grand jardin derrière, comme il se contient, entouré de murs, ensemble un jardin-verger, contenant environ treize ares tenant à celui-ci-dessus dont il est séparé que par un mur, le tout sans en rien réserver ni excepter, situé à Woippy, près Metz, lieudit en Nachy ou Choote (Chouette).
Ladite maison limitée par la ruelle de Nachy, le jardin ci-dessus qui en dépend et les Srs Henrequelle, père et fils, et un autre particulier propriétaire d’une petite maison à eux vendue par M. Ibrelisle, suivant acte public passé devant Me Lapointe, notaire à Metz, ainsi qu’il a été déclaré.
Et l’ensemble de la propriété est limité par la ruelle de la Fontaine au nord, le chemin à côté des terres au levant, M. Valoz au midi et la ruelle de Nachy au couchant. Appartenant au vendeur comme lui étant échue de la succession de Remy Augustin Ibrelisle, lorsqu’il vivait chirurgien en en chef à l’hôpital militaire de Metz où il résidait et de Dame Thérèse Villeroy, décédée, sa veuve, ses père et mère.
Partie desdits immeubles provenait auxdits défunts Sr et De Ibrelisle d’acquisition qu’ils en ont faites :
 1° de Mr Paul Victor Simon, maître de forge, demeurant à Hombourg, et de De Marguerite Villeroy, son épouse, par contrat passé devant Me Guevet père, alors notaire à Metz, le premier Thermidor an huit, la minute enregistrée le huit du même mois ; et lesdits époux Simon tenaient les biens par eux vendus des successions de M. Claude Villeroy, vivant résidant à Metz, et de De Catherine Drouot, son épouse, ainsi qu’il résulte d’un partage … devant Me Guevet le même jour premier Thermidor an huit.
 2° du Sr Nicolas Boucherez demeurant à Woippy, et de Marguerite Mathelin sa femme, aux termes du contrat passé devant Me Baudouin alors notaire à Metz, le treize Brumaire an onze, la minute enregistrée le lendemain dont l’expédition a été transcrite au bureau des hypothèques de Metz le quatorze du même mois de Brumaire, volume onze numéro deux cent dix-neuf ; ce contrat contient vente du jardin-verger ci-devant désigné qui provenait desdits époux Boucherez de l’acquisition par eux faite au directoire du ci-devant district de Metz, sur l’émigré de Bock *.
L’autre partie dudit immeuble a été recueillie par ladite défunte Dame Ibrelisle des successions des nosdits Sr et De Claude Villeroy et Catherine Drouot, ses père et mère, au terme du partage déjà précédemment rapporté du premier thermidor an huit.
Enfin la maison a été construite sur une partie desdites propriétés par mesdits Sr et De Ibrelisle, père et mère du vendeur.
Le tout ainsi que ce dernier l’a déclaré.
Pour par M. Pécheur, ladite Dame son épouse, leur héritiers et ayant cause, jouir et disposer à l’avenir desdits maison, jardins et dépendances en l’état où le tout est et comme il se contient et pour… dans ce moment et ainsi qu’en avait le droit M. Ibrelisle et ses auteurs de quoi M. Pécheur a dit avoir une parfaite connaissance et se contenter.
Cette vente est faite sous les conditions suivantes :
 1° franche et quitte de tous cens et rentes.
 2° à charge des servitudes passives, apparentes ou occultées, continues et discontinues s’il y en a sur lesdits biens, sauf à M. Pécheur et à ladite Dame son épouse, à s’en défendre et à faire valoir à leur profit, celles actives s’il en existe, le tout à leur frais, risques et périls.
Il est reconnu et déclaré par M. Ibrelisle qu’en vendant auxdits Srs Henrequelle et autre par devant ledit Mr Lapointe, la petite maison attenant à celle présentement aliénée, il a été interdit aux acquéreurs de prendre jour sur la propriété vendue par la présente et qu’il s’est réservé la faculté d’exhausser d’un pied ou trente-trois centimètres le mur de la petite cour qui est derrière la maison desdits Srs Henrequelle et autre, enfin que ces derniers sont tenus et obligés de … la fermeture aux frais du vendeur toute ouverture pratiquée dans le mur de cette petite cour. M. Ibrelisle qui garantit l’exactitude de cette déclaration subroge mesdits Sr et De Pécheur à leurs droits à ce sujet, pour par ces derniers, les exerce comme il aurait pu le faire lui-même sans les présentes.
 3° Et en outre moyennant la somme de quinze mille francs, prix convenu entre les parties qui l’ont ainsi déclaré, laquelle somme de quinze mille francs, M. Pécheur promet et s’oblige de payer et délivrer en l’étude dudit Me Guerquin, savoir : Cinq mille francs quinzaine après la transcription des présentes, pourvu qu’il n’existe point d’inscription sur les immeubles vendus et les Dix mille francs restants dans un an date d’aujourd’hui, avec les intérêts du tout sur le pied de cinq pour cent annuellement et sans retenue à courir au… de ce jourd’hui ; le tout en numéraire … au cours actuel sans mélange de cuivre ni de papier monnaie sans quelle dénomination ce puisse être, aurait-il pour force entre les mains dudit vendeur. Pour sûreté de quoi les biens sus vendus demeurent par privilège spécial, obligés et hypothéqués.
Au moyen des présentes M. Ibrelisle consent que M. Pécheur et Mme son épouse soient et demeurent dès ce jour propriétaires incommutables de tous lesdits immeubles et qu’ils en jouissent à l’instant.
Les contributions foncières seront acquittées par Mr Pécheur à compter du premier janvier prochain seulement.
Reconnaissant ce dernier que Mr Ibrelisle lui a à l’instant remis deux expéditions, la première du contrat d’acquisition du premier Thermidor an huit et la seconde de celui du treize Brumaire an onze, dont décharge.
Fait partie de la présente vente le petit terrain partant des lieux d’aisances en ligne droite jusqu’au mur du jardin, venant de la commune de Woippy et sur lequel il y a une place à fumier.
Pour l’exécution des présentes, domicile est élu en l’étude dudit Me Gerquin.
Fait et passé à Metz, en l’étude, l’an mil huit cent trente-deux le huit septembre avant midi, et ont mesdits Srs vendeur et acquéreur signé avec les notaires, lecture faite.

* Pendant la Révolution française, les émigrés sont des Français qui quittent la France pour des raisons politiques et se réfugient à l'étranger. Leurs biens sont alors confisqués et mis en vente comme biens nationaux.

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Liste des émigrés, déportés et condamnés pour cause révolutionnaire
du département de la Moselle (1791-1800)

par André GAIN
(Annuaire de la Société d'Histoire et d'Archéologie de la Lorraine, 1925, pages 501-503)
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336. Bock (Jean-Nicolas-Etienne, baron de), lieutenant des maréchaux de France, 1re liste, p. 3 (district de Metz), p. 62 (district de Thionville) ; liste des parents d'absents, p. 2.
  Biens : Le baron de Bock était l'un des plus grands propriétaires du département ; dans le district de Metz, à Metz, hôtel meublé (rue des Bons-Enfants) et dix contrats de constitution (4.111 li. 10 s., plus les intérêts) (procès-verbaux des 25, 28 oct., 1er et 4 nov. 1792) ; à Hauconcourt, maison, jardin, prés et bois ; à Argancy, maison, terre et prés ; à Antilly et Buy, métairie de 195 jours et demi de terre et plusieurs maisons (procès-verbal du 24 sept. 1792), etc. En outre, diverses propriétés indivises avec Boudet de Puymaigre.
Dans le district de Thionville à Metzeresche, maisons, terres, prés, bois, etc. (délibération du district des 16 et 25 août 1792) ; à Luttange, 135 jours de terre du produit annuel de 25 milliers de foin, plusieurs rentes de froment, jardins, bois, 2 maisons et dépendances, affermées. Il avait en outre des biens dans la Meuse (voir liste de M. Dubois, p. 35, n° 150), dans le Haut-Rhin (?), etc.
Né à Thionville le 14 janvier 1747, le baron de Bock, fils d'Etienne de Bock, lieutenant des maréchaux de France et d'Elisabeth Hennequin, émigra en 1792, ainsi que son épouse Marie-Charlotte-Elisabeth-Adélaïde de Savonnières (voir ce nom), épousée le 8 déc. 1767. Pour obtenir sa radiation et récupérer sa grosse fortune territoriale, il fit successivement valoir deux moyens : sa qualité d'homme de lettres et sa nationalité étrangère. Comme littérateur, de Bock a traduit le baron de Trenck, Hermann d'Unna, le Chevalier des Sept-Montagnes, etc. (Voir : Viville, Dictionnaire de la Moselle, t. I, p. 495, et Bégin, Biographie de la Moselle, t. I, p. 97-103). Il était difficile cependant d'expliquer par des nécessités littéraires son départ de Metz, domicile ordinaire de sa famille, en avril 1792. Il se rendit d'abord chez son beau-frère de Requin à Bionville et Raville, où il resta sans avoir « même découché » jusqu'au 18 mai, puis à Bitche jusqu'au 3 juillet. Passant alors la frontière, il se rendit à Mannheim et à Heidelberg, jusqu'au 27 octobre ; le 30 octobre 1792, il était rentré à Strasbourg, où il resta jusqu'au 31 janvier 1793. Inscrit sur la liste des émigrés, il réclama sa radiation ; la commune de Metz passa outre en déclarant qu'il n'avait cultivé les lettres et les arts qu'en amateur (28 pluviôse an III), mais le 6 vendém. An IV, sur le vu des certificats fournis par les municipalités de Strasbourg, Maizeroy et Bitche, le district de Metz décidait de le rayer ; le 4 messidor an V, le département prononçait provisoirement sa radiation.
C'est alors que pour obtenir une décision définitive, il eut le malheur de rappeler qu'il était membre de la noblesse immédiate de l'Empire, immatriculé aux deux cantons de Souabe (Kocher et Ortenau) et à celui du Haut-Rhin. De nationalité allemande, selon lui, avant la Révolution, il témoignait que Louis XVI l'avait autorisé à porter en France la décoration du canton de Kocher (lettre de Vergennes du 2 janvier 1786), etc. En réponse, un arrêté du Directoire exécutif du 18 thermidor an VII, cassa la décision du département de la Moselle, déclara de Bock définitivement émigré, ordonna la vente de ses biens et lui interdit de rentrer sur le territoire qu'il avait dû quitter, sans doute, en exécution de la loi du 19 fructidor an V pour se rendre à Anspach, selon Bégin. En messidor an VIII, de Bock réclama le rapport de cet arrêté, il fut soutenu par le préfet de la Moselle et obtint enfin, le 2 frimaire an X, un arrêté des Consuls qui le rayait définitivement. Le 23 frimaire, il promettait fidélité à la Constitution de l'an VIII, mais en réservant formellement ses « droits à revendiquer » comme membre de la noblesse d'Empire. Ces restrictions frappaient sa promesse de nullité ; Fouché consentit à l'accepter cependant, étant donné « qu'un étranger ne pouvant… être assujetti à cette formalité, la promesse du baron de Bock est à la fois inadmissible et inutile. » (23 nivôse). De Bock était rayé, mais sa fortune était perdue. Ses répétitions pour récupérer sa bibliothèque (réclamation appuyée par son ami le docteur Hollandre), ses obligations allemandes séquestrées, furent seules sans doute à être accueillies ; ses biens avaient tous été vendus, y compris celui d'Amelange, qu'il avait acheté le 26 mars 1791 (bien de première origine). Définitivement rentré en France en 1802, le baron de Bock se fixa à Arlon, puis à Luxembourg, où il devint conseiller de préfecture, et mourut en 1809.
  Indemnité : Réclamée en 1825 par Mme de Savonnières, sa veuve, et ses deux fils (voir les suivants), elle monta à 7.461 fr. de rente au capital de 248.690 fr. 89, défalcation faite d un passif de 62.062 fr. 91.

337. Bock (Charles-Juste, baron de), capitaine d'infanterie, fils du précédent, présumé visé par l'inscription de son père, rue des Bons-Enfants, sur la liste des parents d'absents, p. 2.
  Charles-Just avait émigré avec son père. Il devint à son retour secrétaire du comte de Lacépède, son parent, ensuite secrétaire particulier de la grande chancellerie de la Légion d'honneur que dirigeait ce sénateur, puis chef de la première division du personnel, position qu'il quitta en 1830. Retiré en Touraine, dans sa propriété des Bournais, il y mourut à 84 ans le 4 février 1862. Il était né le 21 oct. 1777 et fut rayé par Fouché le 6 brumaire an X.

338. Bock (Félix de), frère du précédent, né le 20 août 1783, présumé visé par l'inscription de « Bock, père et fils, rue des Sœurs Colettes », à Metz, sur la liste des parents d'absents, p. 1.
  De Bock, rue des Bons-Enfants, porté p. 2 de cette liste, est bien Jean-Nicolas-Etienne, puisqu'il est dit baron. On peut supposer que l'un des deux fils de Bock, sans doute Charles, l'aîné, demeurait séparément rue des Sœurs-Colettes, ce qui valut à son père une inscription cumulative et irrégulière sur une liste où il n'aurait dû figurer qu'une fois. Si cette explication est inexacte, Félix de Bock n'a pas émigré, et il y eut deux autres de Bock à Metz, un père et son fils, qui émigrèrent. (François-Gaspard de Bock, peut-être ?)

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