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  Dernière mise à jour : 9 août 2011

La Fraise à Woippy
( Articles de presse )
1930 - 1934

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Lundi 16 juin 1930
Une richesse lorraine : La fraise du Pays messin.

Voici donc revenu le temps des fraises, et le fruit si savoureux et bien soigné dans les champs qui, autour de Metz, furent jadis défrichés par les moines de Saint-Eloi et de Saint-Pierremont, met partout sa rouge joliesse.
C’est une richesse mosellane que l'on oublie trop souvent quand on fait le bilan des productions de notre terre, la plus variée des terres. Pourtant, elle fait vivre nombre d'agriculteurs du Val de Metz et notre département arrive, et de loin, en tête de tous les départements français pour la récolte de ce fruit. On peut l'estimer bon an mal an à 40 000 quintaux contre 15 000 pour le département français le plus avantagé. L'histoire de cette culture est simple. Elle a débuté, voici quelque soixante ans, dans la paroisse de Woippy, qui en eut longtemps le monopole. De là, elle s'est étendue peu à peu vers le sud : Novéant, puis Moulins, Ars-sur-Moselle, Plappeville puis vers le nord vers les vieilles terres barroises de Norroy, de Saulny, et même sur la rive droite de la Moselle, au pied des pitons du vieux pays de l'Isle. Aujourd’hui, vingt-cinq communes, au moins se livrent à la culture des fraises.
En somme, il se produit dans le vignoble mosellan le même phénomène que dans le vignoble bourguignon avec le cassis. La culture de la fraise, qui a d'abord été un appoint pour les viticulteurs tend à se substituer à la culture de la vigne. Toutefois, il faut tenir compte de deux différences essentielles : la culture du cassis demande relativement peu de soins, peu de main-d'œuvre, la cueillette s'opère une seule fois sur les mêmes plants, et elle est à coup sûr beaucoup moins aléatoire ; en second lieu elle est restée un appoint.
La culture de la fraise demande au contraire des soins assidus, une véritable culture, elle exige du travail, elle demande de la main-d’œuvre particulièrement importante au moment de la cueillette. Enfin, elle n'est pas un appoint, mais ce qui est toujours un danger le seul gagne-pain d'une population ; elle finit par devenir une monoculture.
Il faut donc que l’économiste qui étudie la question songe à tout cela. Une population particulièrement intéressante, qui nous tient à cœur parce que très proche de nous, peut souffrir d'une situation déterminée. La question vaut la peine qu'on l'étudie, au-dessus des intéressés.
Il ne faut pas oublier que, pour courte que soit la saison de la récolte, avec vente obligatoire immédiate sans attente possible, cette saison doit donner au cultivateur la récupération des frais qui, eux, se répartissent sur toute une année, le loyer de la terre, le salaire du travail, le bénéfice légitime enfin. Nous avons affaire à une denrée essentiellement périssable.
Que font, dans de pareilles circonstances d'autres pays? En Amérique, la Californie qui est aussi le pays des fraises, a aménagé des wagons spécialement construits pour le transport des paniers de fraises, avec un système réfrigérant qui permet, après quatre jours et cinq nuits de voyage, de livrer le fruit aussi frais que s’il venait d'être cueilli, sur le marché de New-York ; dans un autre ordre et sur une plus vaste échelle, le Guatemala a équipé toute une flotte pour le transport des régimes de bananes.
La France, qui est le pays du fruit, n’est pas encore organisée pour de pareils transports, sauf sur certaine ligne privilégiées. On vient cependant de constituer à Paris un office du fruit qui va justement s'efforcer d'étudier la production et les possibilités d’écoulement du fruit français. Nos cultivateurs du Pays messin feront bien de s'en préoccuper et de s'y faire représenter.
Mais pour cela, il est nécessaire qu'ils se constituent en puissantes corporations. Le Syndicat de Woippy existe, d'autres doivent se créer, s'affilier les uns aux autres, former un faisceau qui pourra faire entendre sa voix et sortir de difficultés qui se répètent chaque année et auxquelles les plaintes, les doléances n'apportent aucun remède. La question des transports, insoluble pour des particuliers, pour de petites Sociétés, ne peut être résolue que dans un organisme national.
Enfin, il faudrait traiter davantage de fruits sur place; les fabriques de conserves de Metz ont une vieille et légitime réputation, mais elles sont loin de pouvoir absorber toutes les possibilités. Pourquoi ne pas rechercher su place une extension de cette industrie qui serait le débouché naturel des produits maraîchers du Pays messin ?
Enfin, il semble bien que les producteurs continuent de regarder vers l'Allemagne. Les acheteurs allemands restent trop leur suprême ressource, et ceux-ci ne le savent que trop. Sans doute demandent-ils moins de soins, sont-ils moins difficiles, mais, est-ce une raison suffisante ? Le fruit messin se trouve ainsi handicapé par les droits de douane, payés non par l'acheteur, mais sous forme de moindre prix par le producteur lui-même, d'autant que depuis la guerre, l'Allemagne cultive davantage de fruit.
C'est donc vers la recherche de nouveaux débouchés que doivent tendre les efforts des cultivateurs de fruits du Pays messin. Ici encore, les associations puissantes sont nécessaires ; elles seules peuvent faire les recherches, expédier à temps voulu les échantillons, s'informer rapidement des prix et des demandes des grands marchés et surtout faire toute la publicité nécessaire. On ne vend rien sans publicité.
Or, si l'on parle beaucoup de fraises, à Metz, aucune revue économique n'a encore signalé cette richesse, aucune étude, pourtant intéressante, de la transformation de cette contrée, n'a été tentée. La mirabelle, moins abondante, a eu plus de chance.
Si les syndicats voulaient bien, en temps voulu, se mettre en rapport avec quelques-uns d'entre nous et nous fournir les statistiques, nous serions volontiers à leur disposition pour les faire mieux connaître.
Et cependant, cette population du Val de Metz qui, sur les champs ancestraux, remue avec amour une terre dont elle est en droit d'attendre, après une année de peines, un légitime gagne-pain, mérite qu'on lui vienne en aide, à condition que, par 1'association, elle consente à s’aider elle-même.
Et cependant, la façon de cultiver, le soin précieux apporté à la récolte, font de la fraise messine un fruit de choix, d’une belle grosseur, d'une belle couleur, savoureuse, digne de figurer sur toutes les tables, et facile à confire. Certes, aucune ne peut lui être comparée. Chez nous, la nature elle-même, en aidant les hommes, aime les choses finies.
Voilà pourquoi, quand nous chantons notre Lorraine, il ne faut séparer aucune des couleurs de son blason et si, en septembre, la mirabelle y met son or rutilant, plus précoce la fraise y met la bande rouge en plein cœur, symbole de Metz, cœur du pays Lorrain.
Marcel Grosdidier de Matons.

Vendredi 20 juin 1930
La récolte des fraises au Pays messin s’est poursuivie hier avec intensité.

Malgré ce qu’il a déjà écrit, précisément parce qu’il a déjà écrit sur les fraises du pays messin, le « Lorrain » se réserve de revenir, plus tard, la récolte finie, sur la campagne 1930. Les conclusions seront, hélas, une fois de plus, celles que nous tirons tous les ans !…
Contentons-nous pour aujourd’hui d’une rapide chronique. Dans le centre de Woippy, les marchandises destinées à la confiture ont été payées, selon qualité, 1 fr. 60 le kilo et aux environs. La fraise de consommation a été payée 2 fr. 10 le kilo, la tomate, les autres un rien moins cher.
On a énormément travaillé hier, nous déclarait M. de Ladonchamps, le dévoué président du Syndicat des producteurs de Woippy ; plusieurs wagons ont été refusés, les demandes affluent. Les prix semblent se raffermir, avec tendance probable à monter. La baisse des prix de ces derniers jours provient qu’en Allemagne, principal acheteur, la chaleur tropicale empêchait, d’un côté, les fraises de Metz d’arriver en parfait état, de l’autre faisait mûrir rapidement la récolte de ce pays qui a alors inondé les marchés. Comme la récolte en Allemagne sera terminée rapidement, il est à prévoir que le prix d’ici iront plutôt en s‘affermissant. (LL)

Samedi 21 juin 1930
Au pays des fraises. Amélioration dans la journée d’hier.

Ainsi que le Lorrain d’hier le laissait prévoir, la situation du marché de la fraise s’est nettement améliorée dans la journée d’hier. Les prix qui, ces jours derniers, en Allemagne, étaient tombés à 30 et 25 pf., sont remontés hier matin à 60 pf. la livre, aux Halles de Berlin, prix auquel 13 wagons de Metz ont été très vite vendus. La fraise allemande s’est traitée de 55 à 65 pf.
Vraiment, c’est là un beau succès pour l’organisation syndicale des producteurs du pays Mosellan, en particulier pour le président de l’Union des Syndicats, M. de Ladonchamps.
Ajoutons que les prix payés hier à la production ont été, pour les fraises de fabrique, 90 centimes la livre ; pour les fraises de consommation , la tomate, 1 fr. 20 ; les autres variétés, 1 fr. 10. (LL)

Mercredi 2 juillet 1930
Les fraises de Bretagne à Paris.

La fraise de Bretagne, qui était expédiée précédemment en totalité sur l’Angleterre, vient de faire sa réapparition sur le marché de Paris pour la première fois depuis cinq ans.
Un premier wagon, expédié il y a huit jours, fut vendu dans de mauvaises conditions, par suite de son arrivée tardive, à 10 heures du matin.
Les arrivages viennent de reprendre à raison d’un wagon vendredi et six wagons de 3 000 kilos chacun samedi.
Le départ de Brest a lieu à 16 heures et l’arrivée le lendemain matin à 4 heures à Paris.
Les représentants de la production fraisière de la Moselle peuvent se souvenir qu’au cours de réunions qui eurent lieu l’hiver, ils avaient été prévenus que la récolte bretonne n’ayant été placée l’an dernier, en Angleterre, qu’avec beaucoup de difficultés, il était presque certain qu’elle serait expédiée à Paris cette année.
C’est chose faite.
La fraise de Bretagne est actuellement très belle. Elle se vendait dimanche, aux halles de Paris, 5 à 6 francs le kilo. Les plantations bretonnes ne sont conservées que de trois à quatre ans au maximum.
Le producteur de la Moselle doit de plus en plus faire tous ses efforts pour obtenir de beaux fruits et cueillir de façon irréprochable. C’est là une condition rigoureuse d’où dépend son avenir.
H. de Ladonchamps, Président de l’Union des Syndicats des producteurs de fraises et fruits de la Moselle. (LL)

Samedi 2 mai 1931
LES RICHESSES LORRAINES
LA FRAISE DE METZ
POUR LA PRODUCTION DES FRAISES, LA MOSELLE SE CLASSE, ET DE BEAUCOUP,
EN TÊTE DE TOUS LES DÉPARTEMENTS FRANÇAIS

« Hommage à tous ceux qui se penchent chaque jour sur la terre lorraine, à laquelle ils restent fidèles, et continuent l’œuvre de leurs pères. » (H. de Ladonchamps.)

Nous reproduisons ci-dessous le texte de la très intéressante conférence que M. H. de Ladonchamps, président de l'Union des Syndicats des producteurs de fraises et autres fruits du département de la Moselle, a faite dimanche 26 avril, à 20 h. 30, au poste « Radio-Strasbourg P. T.T. », sur la Fraise de Metz ».
Nos lecteurs qui possèdent un appareil radiophonique n'ont pas manqué de suivre l'intéressante conférence de M. de Ladonchamps, qui parla au monde entier d'une des productions les plus importantes de notre pays messin.


« Les premières fraises du Midi de la France sont revenues depuis peu sur les principaux marchés. Cette apparition encore assez faible va se préciser toujours plus importante, pour aboutir dans quelques semaines aux arrivages par wagons complets. En voyant ces apports de fruits, qui atteindront quotidiennement en pleine saison des dizaines de milliers de kilos, on ne peut pas ne pas en être impressionné. Spontanément s'éveillent dans les esprits et les imaginations un intérêt et un désir de savoir bien légitimes : Où se trouvent les centres de production, quelle en est l'origine, comment ne sont-ils constitués et développés. Comment fonctionnent-ils ?
Metz est l'un de ces centres. Je remercie son Syndicat d'Initiative qui a prévu dans la série des conférences qu'il organise un exposé à ce sujet. Avant de le faire, je tiens à saluer aussi toutes les auditrices et tous les auditeurs de Radio-Strasbourg qui voudront bien rester quelques instants à l'écoute.

LE BRILLANT PASSÉ DE LA FRAISE DE METZ

La réputation de la fraise de Metz est aujourd'hui consacrée par un brillant et déjà long passé.
C'est en effet vers 1868 que furent faites les premières plantations, et bien téméraire eût été jugé celui qui aurait prévu alors le développement qu`elles prendraient dans le département.
Due, en Moselle, à l'initiative de quelques habitants de Woippy, importante localité située aux portes mêmes de la grande cité messine, la culture de fraisier y acquit rapidement une grande notoriété et y resta longtemps cantonnée. Pendant ses débuts, le marché de Metz et quelques acheteurs de la région suffisaient au placement de la production. Les paniers employés étaient en osier tressé contenant environ 6 kilos ; la redevance payée au camionneur entre Woippy et Metz se montait à 0 fr. 125 par panier et 0 fr. 25 pour le voyage d'une personne. Les premières variétés cultivées furent celles alors en renom : l'Elton, introduite d'Angleterre en France dans la première partie du XIXe siècle, la Marguerite et l'Ananas.
En quelques années, les cultures se développèrent dans les localités immédiatement limitrophes de Woippy : à Lorry-lès-Metz, à Plappeville, à Saulny, déjà connues pour leur production de mirabelles ; cependant les débouchés se trouvaient encore presque tous dans un faible rayon autour de la production. Cette première période dura environ 15 à 20 ans.
Les années 1890 et suivantes virent une grande extension des cultures sur le territoire de Woippy ; le renom de ses produits franchissait de plus en plus les limites du département. Aux acheteurs du pays se joignirent les acheteurs étrangers et l'affluence des demandes entraîna l'intensification des cultures. Une ère nouvelle s'ouvrait. Les bonnes volontés ne suffisaient plus, il fallait coordonner les efforts. Il fallait plus spécialement adopter des variétés qui tout en résistant aux hivers rigoureux de la région fussent aussi à même de supporter les expéditions à longue distance ; il fallait enfin sélectionner des espèces de choix répondant aux goûts de la clientèle qui s'était constituée. Cette clientèle est d'ailleurs devenue telle que les cultures qui s’étaient toujours maintenues au Nord de Metz y débordant à Norroy, Plesnois, Marange, Semécourt, la Maxe et Sierck, à l’extrémité nord du département, se sont étendues, au cours des dix dernières années, à l’Ouest et au Sud.

UNE CULTURE DÉLICATE

Sur les deux rives de la Moselle, les localités se suivent : Jouy-aux-Arches, Novéant, Corny, Féy, Lorry-Mardigny, Marieulles, Vezon, Dornot, Ancy, Augny, Ars-sur-Moselle, Jussy, Sainte-Ruffine, Rozérieulles, Châtel-Saint-Germain, Scy, Moulins-lès-Metz qui, elles aussi, rivalisent de soin, de méthode et de labeur dans une culture particulièrement délicate qui toute l'année demande les soins les plus attentifs.
Dès le retour des premiers beaux jours, hommes, femmes et enfants se répandent dans les champs pour les piochages successifs. A peine un terrain est-il terminé qu`il faut le reprendre ; puis en mai, avec la floraison, ce sont les opérations du « paillage » si important pour le développement des fruits et surtout pour 1a protection contre les pluies. Le paillage permet de livrer des produits absolument nets et sans aucune souillure de terre.
La récolte commence fin mai. Dès l'aube et jusqu'au soir, chaque courbés sur le sol, exposés aux ardeurs du soleil sans pouvoir prendre de mouvement, les producteurs cueillent fruits au fur et à mesure de leur maturité.
Rude coup de collier à donner et qui dure six semaines. Quelle que soit la fatigue, on ne peut s'arrêter, le fruit n'attend pas et il doit même être cueilli non pas mûr, mais à point pour être expédié dans les meilleures conditions.

LES NOUVELLES PLANTATIONS

Les replants sont soigneusement choisis pour les nouvelles plantations qui ne produiront que deux ans plus tard et dont la durée normale ne dépasse guère quatre ans. Puis les piochages reprennent aussi nombreux que le nécessitent la pluie et la température. Inlassables efforts sans cesse répétés, mais trop souvent compromis en quelques instants par la violence d'un orage en cours de récolte ou une gelée tardive en cours de floraison. Afin de donner une idée des dégâts qui peuvent en résulter, il semble édifiant d'indiquer que d'après des chiffres certains, une seule gelée blanche, survenue le 9 mai 1926, brûla une partie des fleurs et réduisit la récolte à la moitié de celle de 1924, année normale. Une gelée analogue se produisit en 1928. Quant à la récolte de 1929, l'hiver long et rigoureux qui l'avait précédée, la réduisit encore du quart de celle de 1926, cependant très faible, et détruisit en outre une partie des plantations qu'il fallut entièrement refaire.
Il n'y a malheureusement pas que les gelées qui bouleversent les prévisions, il faut compter aussi avec les méfaits du ver blanc ou larve du hanneton, particulièrement avide des racines de fraisiers, qu'il ronge et qu'il détruit ainsi Le ver blanc reste trois ans en terre avant de se transformer en insecte parfait et ses dégâts sont tels qu'ils entraînent parfois la suppression des plantations dans lesquelles il étend ses ravages. En l’état actuel des choses, les insecticides sont malheureusement souvent dangereux à employer ou trop coûteux, comme le sulfure de carbone, ou inefficaces ou trop efficaces, car en tuant le mal ils font périr aussi les pieds de fraisiers.
Ces faits établissent assez l'incertitude dans laquelle travaillent les producteurs et les vicissitudes par lesquelles ils passent.

L'ORGANISATION DE LA PRODUCTION

Quoi qu'il en soit, étant donné l'étendue des cultures, les quantités de fruits mises à la disposition de la consommation restent toujours très importantes.
Mais il ne suffit pas de produire, il faut encore avoir des variétés qui correspondent aux besoins de l'acheteur. Il faut assurer les débouchés de la production. Ce sont là des questions délicates qui ont été très heureusement solutionnées. Grâce au précieux concours des Services agricoles de la Moselle, dont le directeur et le professeur spécial d'arboriculture qui lui est attaché donnent toujours à la production le plus dévoué concours, des améliorations sont apportées dans les cultures fruitières et les variétés nouvelles sont suivies.
La confection des emballages est réalisée par plusieurs fabriques dotées des machines les plus récentes et qui sont installées soit à Woippy même, soit aux abords immédiats de Metz, à Devant-les-Ponts et Moulins. La contenance des paniers a été ramenée dès longtemps de 6 à 3 kilos et permet l'expédition à toute distance dans de très bonnes conditions. Ces paniers, de forme rectangulaire, sont en bois déroulé puis coupé en bandes. Au montage, les bandes sont croisées en quadrillage, agrafées, et ce dispositif assure une aération parfaite du contenu en même temps qu'une présentation du meilleur effet.
Plusieurs usines de conserves, elles aussi servies par l'outillage le plus moderne, exercent leur activité à Metz, à Devant-les-Ponts, au Ban-Saint-Martin et à Woippy. Ces usines voient leur effectif décupler pendant la récolte dont elles absorbent une forte partie.

LES SYNDICATS

Les expéditeurs de la région groupés en un « Syndicat des Expéditeurs de Fruits de la Moselle » ayant son siège à Metz, et les acheteurs étrangers, dont beaucoup sont représentés sur place, assurent le placement et l'expédition de quantités importantes.
Enfin, les producteurs ont eux-mêmes leur organisation spéciale, que représentent des Syndicats locaux dont le rayon d'action est en général le territoire de la commune. Presque tous ces syndicats ont une origine remontant à 10 et 30 ans, leur nombre se développe régulièrement.
Cependant, étant donné l'importance et la complexité croissante des questions à résoudre, une liaison est apparue nécessaire entre toutes les organisations isolées. C'est dans ces conditions que fut récemment constituée une Fédération qui, sous le nom de « Union des Syndicats des Producteurs de Fraises et autres Fruits de la Moselle », groupe peu à peu les syndicats constitués et reçoit toujours de nouvelles adhésions.
L'Union des Syndicats s'efforce de servir les intérêts professionnels de ses membres, elle reçoit et groupe leurs produits : fraises, mirabelles, groseilles à grappes et à maquereau, cerises, cassis ; elle les transporte aux gares, en assure le placement et expédie elle-même par wagons complets.
Mais soucieuse aussi des intérêts du consommateur, l'Union des Syndicats veille de très près et en permanence à la qualité des produits qui, par un contrôle attentif et rigoureux, donne toute satisfaction aux acheteurs.

L'ORGANISATION DE LA VENTE

L'organisation syndicale est en relations avec toutes les autorités compétentes, les ministères intéressés, les grandes administrations, les services de transport, la grande presse régionale qui lui apporte son bienveillant concours. Elle fait auprès de ces organismes toutes démarches utiles, s'associe aux différentes manifestations de l'activité fruitière, envoie des délégués en France et à l'étranger sur toutes les places où il est nécessaire, dans l'intérêt de la collectivité.
Les camions et camionnettes automobiles aussi viennent en nombre croissant s'approvisionner sur place dans les dépôts de ramassage et y trouvent toutes quantités qu'ils désirent, depuis 10 ou 20 paniers jusqu’à plusieurs centaines, et le plein de ce qu'ils peuvent transporter.
En raison de la rapidité avec laquelle il faut agir, aucune expédition de détail ne peut être faite ; toutefois l'Union des Syndicats, soucieuse de tous les intérêts, livre à partir d'un seul panier dans certains de ses dépôts.
Aussi, nombreux sont les petits consommateurs, les ménagères ou les excursionnistes qui, pour les conserves et les confitures ou au cours d'une promenade, viennent, et souvent de fort loin, s'approvisionner sur les lieux avec la certitude d'avoir des fruits récoltés le jour même.

LES VARIÉTÉS

Les variétés cultivées, bien que relativement peu nombreuses et adoptées après élimination rigoureuse, sont soigneusement choisies, donnant des fruits superbes pesant jusqu'à 100 gr., fruits moins gros aussi, mais plus délicats, fruits de marché, fruits de table, fruit de conserve et de distillerie.
La régularité de la forme de la fraise de Metz, la saveur très appréciée de sa chair, le parfum séduisant si recherché et unique qu'elle doit au terroir qui la produit, rivalisent à l'envi pour satisfaire à tous les désirs.
Metz, « ville d’art discrète qui se dévoile lentement, mais qui une fois dévoilée apparait si attachante qu'on ne s'en lasse jamais », c'est ainsi que la caractérise M. Grosdidier de Mattons dans l'ouvrage qu'il lui consacre dans la série des villes d'art célèbres, Metz, dont disait encore Barrès : « Il n'y a pas d'autre ville qui se fasse mieux aimer », Metz n'est pas seulement une ville en elle-même accueillante et riche en souvenirs. Sa région industrielle et agricole présente, elle aussi, quelques captivants attraits, et le touriste qui, venant au début de l'été dans l'ancienne capitale de l'Austrasie et qui, franchissant les limites de son enceinte toujours agrandie, et que fera encore reculer son récent accroissement de 10.000 âmes, voudra bien réserver quelques heures à la campagne environnante, pourra assister à l'une des plus intéressantes manifestations qui soit de l'activité rurale.

LA RÉCOLTE

Dès les premiers jours de juin et jusqu'en juillet, une animation sans pareille règne de façon intense dans toute la région. Vers 11 heures et 17 heures, lorsque le producteur rentre des champs, les petites charrettes spéciales à la contrée sillonnent les routes pour se rendre dans les différents dépôts de ramassage. Les paniers y sont rapidement pesés, puis chargés sur les voitures et les camions qui gagnent sans délai les gares d'embarquement ou roulent une partie de la nuit pour être au lever du jour sur les marchés qu’ils desservent.
Dès que la nécessité s'en fait sentir, le réseau des chemins de fer d'Alsace et de Lorraine met en marche un service de transport accéléré par trains spéciaux de grande vitesse, assurant le meilleur acheminement, et rien n'est plus curieux que de voir dans les principales gares d'embarquement des fruits, à Woippy, à Novéant, à Moulins-lès-Metz, à Ars-sur-Moselle, à Augny, l'afflux des voitures, les opérations de pesage général et l’activité fébrile qui préside au chargement des wagons pour l’heure de départ. Réellement, le coup d’œil est unique.

L’IMPORTANCE DE LA PRODUCTION

La statistique de tonnage du « Journal Officiel » classe la production de la fraise de Metz en tête de celle de tous les départements français. Ce sont des trains complets qui partent chaque jour au plus gros de la récolte, dont l'expédition est toujours assurée le jour même de la cueillette. Et que ce soit dans l'industrie du transport ou dans celle du bois, que ce soit dans le développement des machines et l'emploi de la main-d'œuvre, la culture fraisière de la Moselle ne contribue pas peu à l'activité de la région, dont elle est une des grandes animatrices.
Ce sont là de superbes résultats dûs à la vigilante attention du réseau d'Alsace et de Lorraine, à la collaboration dévouée de son personnel à tous les échelons, à l'activité des expéditeurs, transitaires et industriels que nous sommes heureux de remercier tous ici, de même que nous tenons à rendre hommage au dur labeur des populations rurales qui, courbées sur le sol de l'aube au crépuscule, produisent au prix de quelles fatigues et de quelles épreuves parfois ce fruit si apprécié, que dès avant l'ère chrétienne chantait déjà Virgile :
«Qui legitis flores et humi nascentia fraga ».
« Or fortunatos.... agricolas. »
Heureux agriculteurs, disait le poète, mais être heureux !... ce n'est pas toujours avoir les honneurs et la richesse, c’est souvent bien davantage dispenser et assurer un peu de bonheur !
Soyez heureux, robustes travailleurs de notre sol lorrain ; soyez heureux du plaisir qu'égrènent au loin dans les modestes demeures comme sur les tables choisies vos produits, les fraises, charme des yeux, satisfaction des humbles, délices des plus raffinés.

HOMMAGE AU PASSÉ

Avant de terminer cet exposé, il semble nécessaire d'ajouter un mot encore. De même, en effet, que lorsqu'il est donné à l'un d'entre nous de voir une belle œuvre que transmit le passé, la première pensée après en avoir examiné la composition, est d'en rechercher l'auteur : signature d'une toile ou d'un marbre, à défaut manière du pinceau ou du ciseau qui révèle l'exécutant, de même aussi, à notre époque où le centre de culture fraisière de Metz a pris en Moselle un développement sans égal, portant au loin et aujourd'hui dans le monde entier par la voix toute puissante des ondes, les noms de nos campagnes, il est juste de rappeler aux générations qui montent le souvenir de ceux dont elles ont recueilli le précieux instrument de travail qu'ils ont mis entre leurs mains.
A la base du très bel édifice dont au cours du siècle dernier Woippy posa la première pierre et dont il reste l'un des plus fermes piliers doivent être inscrits les noms des deux frères Dominique et Jacques Vion, de François et de Nicolas Lapied, de la famille Barrière-Brohn, de Philippe Mangenot, d'Etienne Zennzenn et de Joseph Marchal, d'Emile Trinel, ayant la plupart encore des descendants directs ou des représentants à Woippy.
Le souvenir de ceux auxquels est dû le présent doit être gardé. C'est acquitter un devoir de transmettre leurs noms à la postérité.
Hommage au passé !... Hommage aux précurseurs !...
Hommage à tous les travailleurs, à ceux de l'usine et à ceux du rail. Hommage à tous ceux qui collaborent à l'œuvre commune. Hommage à tous ceux qui dans notre belle campagne lorraine se penchent chaque jour sur la terre, à laquelle ils restent fidèles, et continuent l'œuvre de leurs pères !
Hommage à la tradition, à celle du labeur, à celle du travail, à celle de la terre.
H. de Ladonchamps
Président de l'Union des Syndicats.

Jeudi 31 décembre 1931
Les droits dont l’Angleterre va frapper nos fraises à l’importation.

Le ministère anglais de l’Agriculture vient de rendre publique une première nomenclature, établie le 24 décembre, des produits horticoles d’importation qui seront frappés de droits spéciaux en vertu de la nouvelle loi douanière qui va entrer en vigueur dès le 5 janvier prochain.
En ce qui peut concerner plus directement la région mosellane, nous remarquons que les fraises importées en Angleterre en primeur du 1er avril au 31 mai, auront à supporter un droit de deux shillings et demi par livre anglaise, et que les fraises importées du 1er au 15 juin, terme extrême de la production des fraises, seront taxées à six pence seulement.
D’ici juin, le rapport des monnaies aura pu varier encore, en sorte qu’il est difficile de tabler utilement sur les chiffres de la présente nomenclature. Toutefois, nos lecteurs adonnés à la culture de la fraise - ils sont nombreux, et hier encore, l’un d’eux nous disait avec quelle impatience ils attendaient des précisions sur la menace des taxes anglaises - nous sauront gré de donner aujourd’hui quelque interprétation intelligible à tous. Nous faisons remarquer encore que celle-ci ne vaut guère que pour le temps où nous écrivons, la livre cotant 87 fr. 50.
Donc, les fraises exportées à destination de l’Angleterre auraient à supporter, du 1er avril au 31 mai, des droits s’élevant en chiffres ronds à dix francs par livre anglaise ; les fraises exportées du 1er juin au 15 juin, auraient à payer une taxe de deux francs par livre anglaise. Si l’on joint à ceci que la livre anglaise n’est que de 453 grammes, on voit que les taxes vont sérieusement compromettre nos exportations.
Le seul palliatif nous semble se présenter sous les apparences d’une très sérieuse organisation des producteurs de fraises, tendant à éliminer le plus justement possible les intermédiaires qui se sont interposés en nombre croissant entre la production et son débouché final. La saison d’hiver pourra être utilement mise à profit dans ce sens par les intéressés, mais il est grand temps : il faut que les deux francs dont seront grevés chaque 453 grammes de fraises soient amortis dans la mesure du possible par de judicieuses compressions. Le consommateur anglais ne paiera certes pas deux francs par livre de fraises en plus des hauts prix qui lui étaient déjà demandés ; quant au producteur français, ce n’est pas à lui non plus qu’il faut songer pour faire les frais de l’opération.
Les prix de plus en plus bas qui lui ont été payés interdisent d’avoir même l’ombre de la pensée de lui demander un nouveau sacrifice. D’ailleurs, les organisations qualifiées des producteurs mosellans pourront non seulement travailler à sauvegarder le débouché anglais, qui n’est pas, tant s’en faut, leur débouché principal, mais encore et surtout à se ménager des débouchés sur le marché français, qui, par contre-coup, se trouvera vraisemblablement encombré. (LL)

Samedi 11 juin 1932
Cueillette des fraises.

Malgré le froid, les fraises commencent à rougir et la cueillette va commencer tout doucement la semaine prochaine. La frontière allemande étant fermée, les producteurs pessimistes se demandent avec anxiété ce que leur vaudra la récolte de cette année. Comme il n’y a guère d’autres fruits, les optimistes espèrent écouler leur marchandise encore avec un petit profit. Souhaitons que ces deniers aient raison !

Jeudi 16 juin 1932
La cueillette des fraises a commencé au Pays Messin.

Dimanche dernier déjà, des isolés venus avec voitures et petits camions ont fait commencer la cueillette des fraises à Woippy, dont le Syndicat a ainsi ouvert la saison des fraises. On parle de 150 paniers qui auraient été ainsi récoltés.
Hier, Woippy a poursuivi la cueillette avec plus d'intensité, de même Lorry-lès-Metz et Devant-les-Ponts. Un wagon a été livré par Woippy à un grossiste. En général les fraises prennent la destination de Strasbourg, Luxembourg et la Sarre.
Les autres villages ne commenceront pas la cueillette avant la fin de cette semaine, d'aucuns même pas avant lundi prochain. La récolte est belle, le fruit bien mûr, mais la quantité ne sera. pas ce que faisait espérer la superbe floraison. Les pluies et le froid ont empêché en bonne partie les fruits de se former, surtout dans l'espèce tardive. Cependant que les acheteurs ne craignent pas, il y en aura pour tout le monde, car les plantations sont cette année. plus nombreuses que jamais.
A la suite de la cueillette d'hier, la journée d'aujourd'hui parait devoir être quelque peu creuse, mais demain la cueillette reprendra de plus belle. Bien entendu les plants demanderaient un peu d'eau pour grossir le fruit.
La frontière allemande, on le sait, est complètement fermée et, elle le restera. Nous avons pu rencontrer hier M. de Ladonchamps, le dévoué président du Syndicat de Woippy et de l'Union des Syndicats de la Moselle. Nous lui demandions la conséquence que pourrait avoir la fermeture de la frontière allemande.
- Pour nous à Woippy, nous répondit M. de Ladonchamps, l'effet se fera peu sentir. Nous accusant d'être les meneurs, les acheteurs allemands nous avaient mis en quarantaine et nous avons été forcés de chercher des débouchés ailleurs.
- Et votre Union des Syndicats M. le Président ?
- Je sors à l'instant d'une réunion de délégués qui a duré deux heures et où nous avons fait du bon travail. Nous avons d'abord décidé de payer le même prix, pour la journée, à tous les syndicats ou villages qui nous fourniront.
- Somme toute, vous cherchez l'unification des prix, autant que faire se peut ?
- Parfaitement; et ceci dans l'intérêt du producteur comme de l'acheteur, car l'acheteur, souvent, hésite de donner le prix demandé par crainte que, le concurrent ayant acheté à plus bas prix ailleurs, l'empêche, en vendant moins cher, de se débarrasser de sa marchandise. Si l'acheteur est assuré de vendre, le producteur est assuré de vendre à son tour.
- Mais cette légitime ambition de l'Union est-elle connue ?
- Nous avons fait une campagne d'affiches et d'annonces. Notre affiche en bleu porte au centre l'écusson départemental syndical, encadré de nos produits du Pays Messin : La fraise en rouge, la mirabelle en en jaune, la groseille en vert. Le tout d'un très bel effet. Nous prenons congé des méritants producteurs de fraises et de leur non moins méritant président, en souhaitant à leur idée le succès qu'elle mérite et que, par ces lignes, le « Lorrain » voudrait aider à réaliser.

Jeudi 16 juin 1932
L’importation des fraises en Allemagne.

A une demande adressée au ministère de l’Agriculture, M. Peter, député de la Moselle, a reçu la lettre suivante :
Ministère de l’Agriculture
Paris, le 10 juin 1932
Monsieur Emile Peter, député de la Moselle, Paris.
Monsieur le député,
Par lettre du 12 mai dernier, vous attirez mon attention sur une requête de producteurs et expéditeurs de fruits de la Moselle, protestant contre l’interdiction d’importation des fraises sur le territoire allemand, édictée par le Gouvernement du Reich le 29 avril dernier.
J’ai l’honneur de vous informer que la mesure en question a été prise en exécution du décret alleman,d du 23 février 1932, interdisant, pour raison sanitaire, l’entrée de nos fruits et légumes en Allemagne.
Par mesure de réciprocité, le Gouvernement français a promulgué le décret du 18 avril dernier prohibant l’entrée en France des produits allemands correspondants.
Par ailleurs, je ne perds pas de vue la question des répercussions fâcheuses sur notre commerce d’exportation de fraises des départements limitrophes, que ne manquera pas d’avoir, à l’ouverture de la saison prochaine, la prohibition allemande précitée. D’accord avec les départements ministériels intéressés, une démarche va être, en conséquence, tentée immédiatement auprès du gouvernement du Reich pour obtenir, si possible, la suppression.
Veuillez agréer, Monsieur le Député, l’assurance de la haute considération.
Le Ministre de l’Agriculture, signé : Abel Gardey. (LL)

Jeudi 16 juin 1932
La cueillette des fraises en Pays Messin.

La cueillette se poursuit dans les centres que nous indiquions dernièrement : Woippy, Lorry-lès-Metz et Devant-les-Ponts. Mais, pour le 3ème jour de récolte, elle ne bat pas encore son plein comme l’an dernier à pareil jour de saison.
On voit beaucoup de producteurs qui s’adonnent aux travaux des champs : fenaison, piochage, etc., ce qui prouve qu’ils ne sont point surchargés de travail. Dans les autres villages, la récolte est à peine commencée, on attend encore, comme nous l’avions dit, la fin de cette semaine ou le début de la prochaine.
En général, les fruits sont bien à point, mais ce n’est pas le mûrissement hâtif, brusque des autres années, qui imposait une activité plus intense, dès le début.
La moyenne des prix payés au producteur est de 4 fr. 20 le kilo.
Woippy a certainement cueilli le double d’hier. Dans les autres localités, c’est le camion qui est le moyen d’évacuation de la fraise, jusqu’au jour où, la récolte étant plus forte, l’évacuation se fera par les gares. (LL)

Samedi 18 juin 1932
Le marché des fraises. 17 juin.

Le beau temps aidant, la cueillette se fait plus active. C’est ainsi qu’hier vendredi, la récolte a été bien plus grande que les jours précédents. A Woippy, seize wagons ont pu être expédiés. Malgré tout, le soleil ne semble pas encore « travailler » au gré des consommateurs, puisque la demande semble vouloir dépasser l’offre.
Les acheteurs ont déclaré hier aux producteurs qu’ils payaient le kilo 4 fr. 30 pour la journée du jeudi, et 3 fr. 60 pour hier vendredi. (LL)

METZ - FAITS DIVERS
Voulez-vous des fraises ? Allez les acheter chez le producteur, pour 3 fr. vous en aurez un kilo. A Metz, on pouvait en acheter, hier, à 3 fr. 50 la livre. (LL)

Lundi 20 juin 1932
Dans la région. La cueillette des fraises.

Malgré le ralentissement dans la cueillette de fraises durant la journée de samedi, les apports d’hier ont été peu importants. Les fruits étant sains et bien à point, la cueillette ne presse pas. A Woippy, le Syndicat des producteurs a fait annoncer samedi qu’il payait 3 fr. 20 le kilo.
Dimanche, le même organisme était preneur à 2 fr. 90. Ces prix doivent rester fermes, sinon augmenter aujourd’hui et demain. D’autre part, la récolte commence à se développer sérieusement à l’ouest et au sud de Metz et nombreuses sont les camionnettes sarroises qui sillonnent nos routes pour venir s’approvisionner dans le val de Metz. Le nouveau débouché que constitue le nord devient très intéressant. Vendredi, huit wagons ont été expédiés de Woippy à destinations de Lille et Amiens. (LL)

Jeudi 23 juin 1932
Le temps de fraises.

Renfrognées par les deux jours de froid gris que nous venons de traverser, les fraises ont pris un goût manifeste aux quelques ondées qui se sont abattues hier sur le Pays Messin. C’est de quoi faire grossir à merveille celles qui se trouvaient en état de profiter de ces pluies, d’ailleurs un peu parcimonieuses. Il est à désirer toutefois qu’une honnête chaleur se manifeste à nouveau, avec le soleil de saison. Mais le baromètre donne les meilleures espérances à ce sujet.
Reste la question des prix. C’est toujours là le « hic ». Le prix moyen offert aux producteurs, depuis deux jours déjà, n’excédait pas un franc par livre, avec perspective de baisse. Toujours aussi peu maîtres du marché, les producteurs ont dû d’ailleurs consentir à travailler « dans le noir » depuis deux jours, et à livrer leur marchandises sans savoir combien elle leur sera payée –sans savoir à quelle sauce ils seront mangés.
Si le temps devient favorable au grossissement et à la bonne maturation des fruits on peut s’attendre à de nouveaux affaissements des prix offerts aux infortunés producteurs, sans que le consommateur urbain soit appelé à profiter de la baisse dans la même mesure.
- - o - -
Le « Lorrain » ne saurait trop inviter les producteurs de fraises qui le lise à songer sérieusement à la question « confitures ». Cette année surtout, où la fraise paraît devoir être le seul fruit à confitures passablement abondant, les circonstances semblent propices à un sondage qui peut être gros de conséquence. On sait que l’Angleterre, pays importateur de fruits, a commencé à devenir en France exportateur de confitures, et que des confitures anglaises ont fait leur apparition sur le marché de Metz. C’est donc qu’il y a une place à prendre, et nous redisons à nos producteurs : prenez-la :
S’ils ne se entent pas assez hardis ou assez confiants pour risquer la fondation de confitureries coopératives, nous leur proposons de tâter le terrain de la façon suivante :
lorsque les prix des fraises à la production auront cessé d’être rémunérateurs, que chaque producteur entreprenant fabrique quelques dizaines de kilos de confitures qu’il mettra en verrines ou en seaux métalliques, et qu’il cherche à toucher la clientèle bourgeoise. Quant à nous, nous offrons aux producteurs de fraises abonnés au « Lorrain » d’insérer l’annonce en vente de leurs confitures à titre gracieux jusqu’à écoulement de leurs marchandises. Nous sommes fermement convaincus qu’il y a là une spécialité messine à créer, comme on a créé à Bar-le-Duc une spécialité avec la groseille. Alors qu’on écoule à Paris de grandes quantités de confitures industrielles « aux fraises », qui ne comportent que quelques fruits emprisonnés dans une gelée tirée de pommes à cidre, nous croyons qu’il y a une place à prendre pour les délicates confitures pur fruit que savent réussir toutes les ménagères du Pays Messin. Nous croyons qu’il y a de l’avenir chez nous, nous le redisons avec force, pour la confiturerie, et nous espérons que les producteurs qui nous lisent entendront, avec nous, prouver le mouvement en marchant. En tout cas, ils ne doivent pas oublier, en présence du rétrécissement progressif des marchés étrangers, que le temps est venu de travailler en profondeur le marché national. (LL)

Mercredi 29 juin 1932
A Woippy. M. de Ladonchamps donne sa démission de président du Syndicat des producteurs de fraises.

Hier après-midi, nous apprenions que M. de Ladonchamps, qui, depuis de nombreuses années, se dévoue pour assurer aux producteurs de fraises de la région de Woippy une juste rémunération de leurs peines, venait de donner sa démission de président du Syndicat de Woippy. La nouvelle était malheureusement exacte.
Nous ne croyons pas nous tromper en attribuant la démission de M. de Ladonchamps au manque d’esprit syndical et coopératif chez un certain nombre de producteurs. On connaît la raison d’être et la façon de procéder au Syndicat des producteurs de fraises : il demande à ses adhérents de lui fournir toute la récolte qu’il se charge d’écouler, quelle que soit la production journalière. C’est donc au Syndicat que doivent s’adresser ramasseurs et grossistes, lequel syndicat fixe les prix au mieux des intérêts des producteurs. Avec le Syndicat c’est la vente assurée, c’est la régularité des prix, biens si précieux quand apparaissent les joueurs à la baisse.
Malheureusement, cette nécessité de plus en plus grande de se grouper est mal comprise, et d’aucuns considèrent encore le Syndicat comme un preneur de la marchandise que l’on n’a pas pu écouler ailleurs. La semaine dernière déjà, nous dit-on, on a constaté au Syndicat un ralentissement dans la livraison. Des marchés privés se pratiquaient sur la route, au détriment du groupement.
Dimanche soir, le Syndicat fit annoncer que d’importantes commandes avaient été faites pour le lendemain, et demandait au producteurs de livrer le plus possible. Mais le lundi vers midi, le Syndicat ne recueillait que 900 paniers, de sorte que plusieurs wagons commandés ne purent être expédiés. Découragé, M. de Ladonchamps envoya alors sa démission de président, précisant qu’il ne reviendrait pas sur sa décision.
Hier mardi, dès la première heure, le comité alla exprimer ses vifs regrets au président démissionnaire, le remerciant pour le dévouement et le désintéressement dont il avait fait preuve à la tête du Syndicat. M. de Ladonchamps ne revint cependant pas sur sa décision, et, hier, à 20 heures, le Syndicat se réunissait au Café du Commerce, sous la présidence de M. Sechehaye, maire, pour trouver une solution.
Car, il faut une solution, une bonne et rapide solution. La démission de M. de Ladonchamps fut très commentée pendant la journée, et très nombreux étaient les regrets exprimés. Tout le monde reconnaît, en effet, que le président démissionnaire n’avait qu’un but : celui de défendre les intérêts des producteurs, et qu’à cette tâche il consacrait le meilleur de son temps.
La conséquence de cette démission a été l’absence de prix fixes pour la journée d’hier. On nous signale que la fraise précoce, qui ne supporte plus l’expédition en wagons et en camions, s’est vendue aux environs de 1 fr. 70 le kilo ; la tardive a atteint 2 fr. 10.
Nous ignorons les décisions de la réunion qui s’est tenue hier soir. Mais quelles qu’elles soient, nous demandons une fois de plus à nos amis de Woippy de se serrer les coudes, et de bien se pénétrer de cette idée que la solution syndicale et coopérative est la seule bonne. Il y va de leur intérêt, de l’intérêt de la culture fraisière dans la pays Messin.
- - -
Pas d’accord !…
La réunion tenue hier soir sous la présidence de M. Sechehaye n’a pas obtenu de résultat pratique, l’accord n’ayant pu se faire, malgré l’empressement du dévoué maire. Une autre réunion aura lieu aujourd’hui.

Jeudi 30 juin 1932
Le Syndicat des fraisiers de Woippy est reconstitué.

Au cours de la réunion de mardi soir, le Comité du Syndicat s’est rassemblé et a décidé, d’un commun accord avec les producteurs, de continuer à ramasser et à vendre les fraises. Des anciens mandataires ont été désignés pour remplacer ceux qui travaillaient, cette année avec M. de Ladonchamps, et ce dernier a promis de les aider à se mettre au courant, autant qu’il le pourrait.
Le Syndicat des fraisiers de Woippy n’est donc pas mort ; et, hier soir, à l’assemblée générale qui a été convoquée à 20 heures, au Café Watier, il a été pourvu au remplacement de deux membres démissionnaires du comité qui n’ont pas du tout l’intention, d’ailleurs, d’abandonner le Syndicat en même temps que leurs fonctions.
La saison des fraises ne durera plus longtemps maintenant, et l’organisation provisoire qui a été prévue jusqu’à la fin de la campagne sera complétée et perfectionnée pour l’année prochaine.
- -o- -
La réunion du comité qui précéda la réunion de tous les producteurs, constat que seul M. de Ladonchamps était démissionnaire, l’autre membre démissionnaire ayant consenti à conserver son mandat jusqu’après la campagne de cette année. Dans ces conditions, aucune élection n’étant prévue par les statuts, le comité et le Syndicat continuent à fonctionner sous la présidence de M. Louis Paulin, vice-président. L’assemblée générale statutaire, qui aura lieu dans le cours de l’hiver, achèvera la reconstitution du comité. Nous souhaitons au Syndicat de Woippy qu’il achève la campagne de 1932 au mieux des intérêts de tous. (LL)

Dimanche 3 juillet 1932
Le prix des fraises.

Le prix payé aux producteurs, qui s’était maintenu sensiblement aux abords de 1 fr. 90 la livre pour la variété dite « Tomate », a baissé brusquement à Novéant, le mercredi 29 juin à 0 fr. 70, entraînant la baisse le lendemain sur certains marchés. Pourquoi ? C’est que les producteurs de Novéant, qui ne travaillent qu’en ordre dispersé, ne peuvent réagir en rien contre les propositions en baisse qui leur sont quelquefois faites, malgré la situation des marchés. Cette situation était la suivante au cours des jours derniers.
Le marché suisse, qui absorbe cette année une grande partie de la production à raison de 40 à 45 wagons par jour, était fermé. Les prix y atteignaient en fin de semaine 2 fr. 9à à 3 fr. le kilo. Même fermeté sur le marché de Strasbourg, sur lequel il arrivait le mercredi 29 juin huit wagons, vendus de 2 fr. 80 à 3 fr. 20 le kilo. Le vendredi 1er juillet, 5 wagons, vendus de 2 fr. 50 à 2 fr. 70 le kilo, et hier, samedi, 5 wagons, vendus de 2 fr. 70 à 3 fr. le kilo. Même bonne tenue du marché de Sarrebruck. Paris s’améliore, le contingentement autorise à entrer en Suisse, et qui était épuisé, a été augmenté. Dans ces conditions, il semble étonnant que les prix proposés aux producteurs ces derniers jours dans certaines localités, Novéant, Ars et autres, n’avaient été que de 0 fr. 70, sinon moins. Le plein de la récolte est terminé ; elle va maintenant rapidement diminuer, les prix doivent donc au moins se maintenir.
L’Union des Syndicats est prête à charger aujourd’hui dimanche, en gare de Novéant, un wagon de 500 à 800 paniers, sous réserve, toutefois, que le Syndicat de Novéant lui envoie son adhésion aujourd’hui avant midi par message téléphoné. L’Union se chargera du camionnage à la gare.
Producteurs de Novéant ! Souvenez-vous de ce que je vous ai dit dans la réunion du 15 mars 1931 : vous n’avez pas suivi alors. Je compte qu’aujourd’hui vos yeux sont enfin ouverts.
H. De Ladonchamps, Président de l’Union des Syndicats des producteurs de Fraises de la Moselle. (LL)

Dimanche 3 juillet 1932
Le prix de fraises.

On nous prie d’insérer : Dans le journal « Le Lorrain » du dimanche 3 juillet est paru un article sous la signature de M. de Ladonchamps, président de l’Union du Syndicat des producteurs de fraises de la Moselle, contre lequel nous sommes dans l’obligation de protester véhémentement.
Les prix payés à Novéant n’ont jamais atteint 1 fr. 90 la livre et ne sont pas tombés brusquement, le 29 juin, à 0 fr. 70. Le 19 juin, cours exceptionnel, 300 fr., le 20 juin, 200 fr. les 100 kg., pour se maintenir à ce cours jusqu’au 26 et descendre petit à petit à 140 fr. le 29.
Le public ne doit pas ignorer ce que tous les producteurs savent parfaitement et que nous voudrions exposer au grand jour.
En partant d’un prix d’achat de 140 fr. au 100 kg., il y a lieu d’ajouter pour courtage et camionnage en gare de chargement une somme variant de 30 à 40 fr. aux 100 kg., soit 140 + 30 (prix minimum) = 170 fr. Le transport de Novéant à Strasbourg est de 21 fr. 50, soit 170 + 21, 50 = 191, 50. A cette somme, il y a lieu d’ajouter 5% pour frais de route, ce qui nous donne 9, 55. Les 5% de perte portent non seulement sur la marchandise elle-même, mais sur tous les frais venant grever la marchandise. Nous arrivons ainsi à un prix de 201, 50 fr., wagon rendu gare de Strasbourg.
Le camionnage, droit de place des marchés et commission du grossiste peuvent être chiffrés à 20%, soit 40, 20 fr., donnant ainsi un prix de vente de 241, 25 fr., auquel il y a lieu d’ajouter le prix de revient de 36 paniers à 0, 80, soit 28, 80. Au total 270, 05 fr. Donc le prix initial d’achat à la production de 140 fr. devient comme prix de vente en gros 270, 95, prix indiqué par M. de Ladonchamps pour les journées des 29 et 1er juillet. Comment pourrait-on payer à la production un prix supérieur à 140 fr., c’est-à-dire 0, 70 la livre, prix correspondant bien au prix de vente sur les marchés visés.
Sur Paris, la calcul est exactement le même, en remplaçant le prix de 21, 50 par 35 fr. Sur la Suisse, nous avons 35 fr. 50 de transport à augmenter pour les importateurs ayant une licence d’importation de 2 fr. suisses aux 100 kg. pour la douane, soit 10 fr. français, et pour ceux n’ayant pas de licence le droit est de 20 fr. suisses aux 100 kg., soit 100 fr. français.
Ces quelques chiffres posent le problème tel qu’il se présente, et les chiffres cités dans l’article d’hier sont nettement tendancieux et ne peuvent avoir comme résultat que de créer une atmosphère d’animosité entre les producteurs d’une part et les commerçants d’autre part, et ce au préjudice de tous.
Et cependant, lors d’un récent voyage d’études dans le Midi, nous avons pu constater, et M. de Ladonchamps était avec nous, que les producteurs travaillent en parfait accord avec les commerçants, avec les Chambres de commerce et toutes les autorités administratives. Nous avons tenu à remettre cette question au point, car il est indispensable que chacun soit au courant d’une question qui tient une importance capitale dans la vie économique de notre région.
Sans exagération aucune, il nous est permis de soutenir que tous ceux qui cette année ont touché au commerce de fraises, ont fait de gros sacrifices qui souvent se sont traduits par des pertes.
Ce n’est pas en provoquant des quiproquos de ce genre que l’on encouragera les commerçants à s’intéresser à une telle production et à les inciter à toujours chercher de nouveaux débouchés, à multiplier leurs démarches pour obtenir de meilleures conditions de transport ou de meilleurs acheminements.
Pour terminer, au lieu de dire aux producteurs que leurs yeux doivent s’être enfin ouverts nous leur disons : « Qui n’entend qu’une cloche, n’entend qu’un son. »
Le Syndicat des expéditeurs en fruits de la Moselle : Président : M. Chatam, Vice-président : Zimmermann. (LL)

Mercredi 6 juillet 1932
Voleurs de fraises.

M. Albert Bombardier, cultivateur à Saint-Remy, a surpris dans son champ de fraises lui appartenant, le jeune Gabriel Wendling, âgé de 18 ans, de Maizières, qui lui avait dérobé une certaine quantité de fraises. Wendling a été remis entre les mains de la gendarmerie et présenté au parquet de Metz, qui l’a fait écrouer. (LL)

Précisions sur le prix des fraises.
Le Syndicat des expéditeurs en fruits de la Moselle, sous les signatures de MM. Chatam, son président, et Zimmermann, son vice-président, répondent dans le « Lorrain » du 5 juillet à un article que j’y avais fait paraître le 3 sur le prix des fraises, spécialement à Novéant. Cette réponse apporte certains chiffres de l’alignement desquels conclut que dans des conditions données, un prix de vente de 270 fr. 95 ne permet pas de payer plus de 140 fr. les 100 kg. au producteur de Novéant.
Nous reprenons donc ces chiffres et nous constatons :
1. La « freinte de route » ou perte de poids par évaporation des fruits a été calculée non seulement sur la valeur de ces derniers, qui dans le cas présent est adoptée à 140 fr. les 100 kg., mais aussi sur les frais de courtage et camionnage au départ et sur le prix de transport par voie ferrée, soit sur 191, 50, ce qui est une inexactitude, involontaire certainement, mais inexacte tout de même.
2. Les frais de camionnage à l’arrivée, droit de place et commission de grossiste sont indiqués comme étant de 20%. Ce chiffre est trop élevé et ne s’établit en général que de 12 à 14%, et même moins, surtout pour les expéditions importantes. Le Syndicat des exportateurs a dû être l’objet, tout comme celui des producteurs, de nombreuses sollicitations dans ce sens.
3. Les frais de courtage et camionnage au départ, indiqués comme étant de 30 (prix minimum) à 40 fr. aux 100 kg. peuvent et doivent être réduits. Ce n’est pas le lieu d’ouvrir une discussion à ce sujet ; disons seulement qu’en l’état actuel des choses et depuis trop longtemps, le producteur qui est tout de même le rouage capital, n’a que ce qui reste lorsque chacun s’est payé et bien payé.
4. Il n’est pas possible de dire que le panier entraîne une dépense de 0, 80 à l’unité ; s’il ne revient pas, c’est qu’il est vendu à son prix, s’il revient et fait seulement deux voyages la dépense ne serait que de 0, 40 par expédition ; il y a donc erreur involontaire, mais erreur de 100% dans le premier cas et de 50% dans le deuxième cas. D’ailleurs, le prix de revient des paniers achetés en première main n’est pas de 0, 80 ; chacun sait que des maisons françaises les livrent à meilleur prix.
Tous ces faits établissent que les prix annoncés à Novéant à la date envisagée auraient pu être supérieurs à ce qu’ils ont été, et je remercie le Syndicat des expéditeurs d’avoir permis par ses chiffres d’en apporter la preuve par 9.
Quant au prix indiqué dans l’article du 3 comme ayant été de 1 fr. 90 à la livre, alors que j’avais écrit 1 fr. à 0,90 (1), il y a eu faute d’impression dont je ne suis pas responsable. Aucun des autres éléments que j’avais présentés sur la situation des marchés n’a été contesté. Chacun jugera si le qualitatif de « tendancieux » appliqué à l’exposé du 3 juillet est justifié ou non, et jugera ce qui peut être retenu de l’appréciation que l’on porte sur celui-ci en le présentant comme un ensemble de quiproquos volontaires de ma part. Quant au reste, « parfait accord » des commerçants et des producteurs dans d’autres régions françaises, « atmosphère d’animosité » ici, les représentants du Syndicat des expéditions doivent cependant bien se souvenir que si dans telle localité parcourue au cours du voyage l’accord fut constaté, il a été loin d’en être de même dans telle autre région et que dans plusieurs, il n’y a même pas la moindre organisation de producteurs ; ceux-ci y sont encore dans le néant !
Chacun qui est au courant de la question se rappellera les différentes tentatives de l’organisation syndicale des producteurs de la Moselle en vue de collaboration. Ces tentatives n’ont pas été suivies. Si l’on veut que je revienne sur ces faits, j’y reviendrai et je dirai ce que les producteurs ont fait pour l’entente.
Présentement j’adresse au Syndicat des expéditeurs deux demandes qui restent valables pour les années suivantes :
1. Annonce publique et dès que les membres du Syndicat des expéditeurs sont à même d’être renseignés :
a) du refus de leur part de telle ou telle variété de fraises, surtout en fin de récolte de la printanière ;
b) de la fermeture de tel ou tel de leurs dépôts de ramassage, si la réduction de la demande ou tout autre motif y oblige. Dans ces deux cas, il est essentiel que le producteur soit prévenu avant de partir cueillir et non pas comme le fait se produit, au moment où il rentre des champs avec sa cueillette de la demi-journée.
2. Indication, par les membres du Syndicat des expéditeurs, des prix payés par eux et cela sans attendre 3 ou 4 jours que les Syndicats des producteurs aient payé eux-mêmes ou fait connaître leurs prix. Pourquoi, lorsqu’on et sûr de soi, pourquoi de se refuser systématiquement à indiquer son prix tant que le Syndicat des producteurs n’a pas fait connaître le sien ?
Et vous, producteurs de Novéant comme de plus d’un autre village, vous à qui l’on a déclaré si souvent et fait croire dur comme fer - vous me l’avez dit l’an dernier le 15 mars - que vos fraises étaient beaucoup plus belles que celles d’autres localités, pourquoi n’obtenez-vous pas toujours en conséquence de plus hauts prix ? Pourquoi trop souvent n’obtenez-vous que des prix nettement inférieurs aux autres ?
A vous tous, producteurs de fraises des différentes localités de la Moselle et de Meurthte-et-Moselle dont j’ai la liste devant moi, j’adresse une demande instante : des écarts énormes dans les prix payés au producteur ont été constatés, sans cause, certaines années, pour une même journée, entre différentes localités ; j’ai sous les yeux les diagrammes établis à ce sujet ; je vous demande cette année de choisir dans chacune des localités une personne compétente que vous renseignerez vous-mêmes, et que vous voudrez bien charger de m’envoyer en fin de récolte l’indication de chacun des différents prix payés chaque jour au producteur par chacun, et avec les noms des différents acheteurs opérant chez vous, et sans oublier les prix traités en gare pour ceux qui opèrent de cette façon, ni les prix donnés dans les écarts de la portion centrale de la commune ; s’il s’y ajoute une commission de ramassage, il y aura lieu de la spécifier. Il est certain que si toutes les localités productrices répondent à cette demande, elles seront en marche vers une sensible unification des prix que tous, expéditeurs, acheteurs, consommateurs et producteurs appellent certainement de tous leurs vœux.
Et une fois nouvelle encore, ce sera le mérite et l’honneur de l’organisation syndicale des producteurs d’avoir, comme pour le contrôle établi par elle dès 1928 pour les étiquettes imaginées, créées, adoptées et appliquées par elle avant qui que ce soit dans le département dès 1930, ce sera son mérite d’avoir une fois de plus débrouillé, coordonné, organisé.
M. de Ladonchamps, Président de l’Union des Syndicats des producteurs de fraises et autres fruits de la Moselle.
___________
(1) C’est en effet une faute d’impression qui indiquait 1 fr. 90, au lieu de 1 fr. à 0 fr. 90. Nous nous en excusons. La Rédaction. (LL)

Mardi 4 avril 1933
Assemblée générale du Syndicat des Producteurs de Fraises.

62 membres du syndicat avaient répondu, dimanche 2 avril, à l'appel du vice-président, M. Louis Paulin, qui présidait la séance. Deux nouveaux membres du comité furent élus et tout se serait bien passé, si l'un des deux. M. Portenseigne, n'avait immédiatement donné sa démission, à la suite d'attaqués violentes dirigées contre les mandataires dévoués, qui avaient eu le mérite de terminer la saison 1932 après la démission du président et des anciens mandataires. Le syndicat de Woippy n'a toujours pas de président, et rien de précis n'a pu, naturellement, être organisé par le comité pour l'année 1933. Il faut espérer que très rapidement, dans l'intérêt des producteurs de fraises, tout s'arrangera et qu'ils auront la récompense des efforts qu'ils feront pour reconstituer leur syndicat. (LM)

Jeudi 8 juin 1933
Et voici les Fraises !…

Woippy a commencé hier la récolte officielle de ses fraises. On est quelque peu en retard, cette année, en raison des dernières gelées, qui firent des victimes parmi les « printanières ». Les récentes chaleurs ont cependant permis aux fraises de… mettre les bouchées doubles, et elles sont prêtes à faire le voyage au marché !
Quels prix seront pratiqués ? On n’a pu encore nous donner de précisions hier, première journée de la cueillette. Quelques centaines de paniers ont été remplis et vers la fin de la semaine, c’est par milliers qu’ils se chiffreront tous les jours.
Bonne chance aux producteurs… et aux consommateurs aussi. (LL)

Dimanche 11 juin 1933
Chez les producteurs de fraises. Début de récolte et perspectives.

C'est à un rythme très modéré que la campagne 1933 de récolte des fraises vient de s'engager. La cause en est surtout aux chaleurs torrides qui ont marqué ces premiers jours du mois de juin.
Les sévères gelées du mois d'avril, ayant stérilisé les premières fleurs jusque dans le bouton - celles-ci, s'épanouissant plusieurs jours ensuite, montraient un cœur complètement noirci au milieu des blancs pétales - semblaient avoir fortement retardé la récolte. Et il est bien vrai que, sans ces gelées tardives, la récolte 1933 eût été exceptionnellement précoce : on eût vraisemblablement vu parvenir les fraises printanières à maturité vers le 20 ou 25 mai.
La chaleur qui vient de sévir, chaleur tout à fait de saison au point de vue thermométrique, a permis d'une part de rattraper un peu du temps perdu : c'est ainsi que la récolte a commencé à Woippy, cette année le 7 juin, alors qu'elle n'avait commencé, l'an dernier, que le 13. Mais, d'autre part, cette chaleur s'est trouvée trop intense pour le stade de développement auquel étaient parvenue les fraisiers, et cet excès relatif leur a été nettement préjudiciable ; un chiffre aidera à le faire comprendre, puisque rien n'est plus éloquent que les chiffres : au premier jour de la campagne 1932, à Woippy, il avait été récolté 1 400 kilos de fraises, tandis qu'au premier jour de la campagne 1933, il n'en a été récolté que 600. Autres chiffres qui découlent des précédents : l'an dernier, les premières fraises printanières de Woippy avaient été payées 4 fr. 30 le kilo au producteur, tandis que cette année, il en a obtenu 5 fr. 50. La considération des quantités récoltées suffit à prouver que le manque à gagner éclipse malheureusement de beaucoup cet avantage de prix.
La fécondité florale, et éventuellement fruitière, du fraisier est telle que le massacre des premières fleurs par les gelées tardives n'aurait pesé que d'un faible poids sur les perspectives du marché, n'eût été la chaleur à la fois forte et soutenue, puis de plus aggravée par un hâle desséchant qui vient de régner sur toute notre région. Quiconque a observé le fraisier dans l'état de nature - ce fraisier des bois si généreusement représenté en Lorraine - sait que celui-ci se plaît en une exposition assez clarteuse mais modérément ensoleillée, et sur un sol assez frais. Sur un sol desséché par le hâle, sous un soleil torride, la fraise, fruit dont la teneur aqueuse est des plus élevée, ne saurait parvenir à la plénitude du poids auquel peuvent prétendre nos variétés de culture. Il arrive même, comme cela a été le cas dernièrement, qu'un excès de chaleur solaire saisisse la fraise parvenue à grosseur et la cuise littéralement sans lui donner sucre ni couleur.
Ceci dit pour montrer que les perspectives de la campagne 1933, sous le rapport de la quantité, se présentent passablement réduites par rapport aux résultats de l'an passé. Elles eussent été plus fâcheuses même si le Pays Messin n'avait pas été abondamment arrosé, hier dans l'après-midi, par la pluie après quoi tous soupiraient depuis plusieurs jours. Cette pluie est venue abreuver le plantes dans d'excellentes conditions, et consolider un abaissement de la température qui leur permettra d'en tirer pleinement profit pour le plus grand bien de la récolte aux jours qui vont venir.
Consommateurs et producteurs ne pourront que s'en féliciter, aussi bien que tous ceux qui, à des titres divers, tirent ressource de la fraise lorraine.
Question importante, pour le producteur surtout, qui dans bien des cas a investi dans ses plantations ses capitaux et son labeur, et qui ressent d'une façon de plus en plus directe les contre-coups des convulsions économiques et politiques, internationales aussi bien que nationales. Sa situation est bien délicate parfois, même sans envisager des problèmes aussi complexes, que ceux auxquels nous venons de faire allusion.
Savez-vous, monsieur - nous disait hier l’un d’eux - que parfois nous sommes liés avec un acheteur dont les propositions ont été faites par lui, et acceptées par nous, au moment de la floraison ? On s’est vu au moment où les champs étaient en fleurs et pleins de promesses. Et puis la gelée est venue, ensuite la brûlure d’un soleil trop ardent : les promesses d’avril ne seront jamais tenues. En conscience, l’acheteur devrait augmenter le prix des conventions faites, mais croyez-vous qu’il le fasse ?
C'est, d'autre part, un autre souci qui vient de se faire jour : les fabriques font déjà connaître que, cette année, elles ne prendront plus les mêmes quantités de fraises qu'aux années précédentes. Et à ce sujet, nous devons dire que la cause de la nouvelle restriction qui menace nos producteurs de fraises est bien digne de retenir l'attention et de provoquer les sévérités d'un journal comme le « Lorrain ». Ceux qui nous suivent savent à combien de reprises déjà nous avons protesté contre les stupidités qui aboutissent à ce beau résultat que des pommes américaines sont vendues en France, dont la région normande est pourtant le paradis du pommier ; que des pruneaux de Californie viennent concurrencer chez nous les produits de l'Agenais, prototypes de tous les pruneaux du monde ; que les pains d'épices de Nuremberg viennent disputer la place de Metz aux fameux pains d'épices de Dijon ; que les sardines portugaises et espagnoles trônent chez nous pendant que les pêcheurs bretons doivent rejeter leurs pêches la mer, etc... Nous ne pensions pas être obligés sitôt de voir une production étrangère venir menacer dans ses moyens d'existence toute une population lorraine particulièrement méritante, et c'est pourtant ce qui vient d'arriver.
Sait-on pourquoi les producteurs de fraises mosellans livreront, cette année, moins de fruits aux fabriques ? C'est parce que celles-ci s'approvisionnent à bien meilleur compte des pulpes d'abricots d'Espagne, et que l'abricot d'Espagne est en train de bouter la fraise lorraine hors de la pâtisserie et de la confiserie françaises.
Et sait-on pourquoi l'abricot d'Espagne est si bon marché sur les places de France ? C'est que des mesures douanières empreintes de la plus parfaite stupidité ne le frappent, à l' entrée en France, que de 25 francs de droits par 100 kilos pour la pulpe, de 90 fr. pour les fruits au naturel.
Et ce tandis que nos exportations en Espagne sont frappées de taxes ayant atteint 504 francs aux 100 kilos! Espagne, Suisse, Allemagne, Italie, frappent à qui mieux nos exportations de taxes qui s'élèvent de 300 à 700 francs aux cent kilos. Et pendant ce temps là, l'importation en France de conserves étrangères dépassait l'an dernier le chiffre fantastique de 150000 quintaux !
On nous permettra, pour finir, d'insister sur ce point. Tandis que la lutte pour le marché suisse vient de se compliquer par suite de l'arrivée de la fraise italienne, que le marché sarrois autorise des craintes pour un proche avenir, il faut du moins garder un débouché pour l'excédent de nos fraises dans la conserverie et la confiture nationales.
Or, le 5 juillet 1932, un projet de loi (sous n° 390) fut déposé par MM. Sérot et Moncelle, députés de la Moselle, tendant à l'augmentation des droits de douane sur les abricots en pulpe d'origine espagnole. En près d'un an, le projet n'a pas encore trouvé le temps de passer.
Si dans une dizaine de jours, il n'a pas retenu l'attention du Parlement, il est à craindre que les fabricants ne réservent point aux producteurs lorrains ce qu'ils sont en droit d'espérer de commandes. L'Etat -ceux qui l'incarnent- finira-t-il par comprendre que sa prospérité est solidaire de celle des citoyens ? A.B. (LL)

Mercredi 14 juin 1933
Fraises, Abricots et Fabriques.

Nous avons reçu de M. de Ladonchamps, le toujours dévoué président de l’Union des syndicats des producteurs de fraises et autres fruits de la Moselle, à la compétence de qui on ne fait jamais appel en vain - comme nous en avons fourni une preuve récente – ces quelques précisions auxquelles il a raison d'attacher une certaine importance. Nous ne saurions mieux faire que de laisser la parole à notre sympathique correspondant :
Ce n'est pas parce que les fabriques françaises et de la région préféreraient s'approvisionner à bien meilleur compte de pulpe d'abricot d'Espagne que la fraise serait handicapée, mais c'est parce que la pulpe d'Espagne mise en boîte en Espagne, arrive à si bas prix sur le marché français que la fraise ne peut plus supporter la lutte et que les fabriques françaises, à leur grande désolation et tout en ne travaillant pas l'abricot espagnol, ne peuvent plus travailler la fraise et vont réduire leur personnel sinon peut-être même cesser le travail.
La cause « producteur » et la cause « fabrique française» est absolument commune en la circonstance.
Ce serait de quoi donner espoir d'obtenir gain de cause si... Mais que le Parlement daigne s'en inquiéter un peu.
Chez nos voisins de Prusse.
Ainsi que nous l'avons déjà indiqué à plusieurs reprises, les fraises du pays de Trèves commençant à faire à nos produits une concurrence très sérieuse sur le marché allemand. Les fruits ramassés dans la région de Trèves, en particulier entre cette ville et la commune de Schweich, sont amenés au marché de gros à Trèves, installé dans l'ancienne caserne Saint-Maximin. On pourra se faire une idée de l'importance de cette culture en apprenant que la seule commune de Bech expédie dès à présent tous les jours quatre wagons de fraises à destination de Trèves. (LL)

Vendredi 16 juin 1933
Fraises, Abricots et Parlementaires

Les articles que le « Lorrain » a publié sur le pressant sujet de la concurrence faite aux terriens mosellans par les importateurs d'abricots d’Espagne ont eu, chez les intéressés, un écho plus grand encore que nous ne pouvions souhaiter. Les preuves d’intérêt ne nous ont pas manqué, et dans bien des cas nous sont parvenus des encouragements et confirmation de ce que nous avons écrit. Notre information s’en est trouvée accrue d’autant, et c'est ainsi que nous préciserons aujourd'hui que la proposition de loi de nos députés, MM. Sérot et Moncelle, a été déposée par eux le 16 juillet 1932, transmise à la commission des finances, et n'a été rapportée que le 8 avril 1933. Inscrite à l'ordre du jour de la séance de la Chambre du 26 mai 1933 pour être votée sans débats, elle a été retirée de l'ordre du jour sur opposition de M. Coty, député du Havre, agissant, semble-t-il, au nom de la Chambre de commerce du Havre, qui le 11 mai dernier avait précisément émis un vœu contraire à la proposition de loi des représentants de la Moselle.
Actuellement, MM. Sérot et Moncelle s’emploient à faire retirer l'opposition de leur collègue. Il y a encore un espoir, bien faible, il est vrai, de voir leur proposition de loi votée avant la fin de la session.
Quant à la situation des fabriques lorraines de conserves, elle est extrêmement simple. Toutes emploient les fraises et fabriquent le plus possible de pulpes de fraises (la pulpe de fraises est, en somme, de la fraise stérilisée, destinée à la fabrication ultérieure de confitures.)
Les pulpes de fraises de la région messine se vendaient autrefois dans toute la France. Elles se vendent de moins en moins, car bien que vendues à perte depuis deux ans, elles sont encore 30 % plus chères que les pulpes d'abricots d'Espagne et naturellement l’immense majorité des fabricants de confitures préfèrent employer le fruit qui leur coûte le moins cher. Dans ces conditions, la fabrication des pulpes de fraises messines diminue rapidement. Elle n'a été, l'année dernière, que le quart de ce qu'elle avait été il y a deux ans, elle sera vraisemblablement encore plus faible cette année.
Cette situation, si elle se prolonge, peut être très grave pour nos producteurs de fraises, car ce sont les fabriques qui absorbaient les excédents de production, les jours où la vente était difficile, ce sont elles qui empêchaient les cours de s'effondrer et qui assuraient aux producteurs l'écoulement de toute leur production (en particulier en fin de saison quand les fraises voyagent mal). Si par suite de circonstances économiques, elles ne sont plus à même de jouer ce rôle de régulateur, on voit que de très importants intérêts lorrains vont se trouver lésés, tant directement que par incidence.
On conçoit tout l'intérêt qu'il y a pour un port français à voir augmenter le tonnage du trafic qui est sa raison d'être, et son indifférence au fait qu'il s’agit d'importations plutôt que d'exportations. On concevrait moins l'indifférence de Qui-de-Droit à un fait qui pose, en somme, le problème de la prospérité française. Et l'on viendrait s’étonner du « déséquilibre de notre balance commerciale » ?


AU PAYS DES FRAISES... WOIPPY
Voici un groupe de cueilleurs et cueilleuses au travail. Naturellement, la cueillette des fraises prend, à Woippy, une importance au moins aussi grande que les vandanges dans les meilleurs pays de vignobles. La vie que la population mènera pendant l'année entière dépend presque entièrement de la récolte des fraises... Aussi, est-ce avec activité que les producteurs de fraises commencent à "nettoyer" leurs champs dès que le permet le printemps, car la fraise ne vient bien que dans les champs propres, d'où les mauvaises herbes ont été soigneusementt extirpées et qui ont été débarrassés de tout ce qui peut gêner le développement des fleurs et des fruits. Et puis, il est indispensable, lorsque tout est bien prêt, de "pailler" entre les rangs de fraises, c'est-à-dire d'entourer les pieds de fumier, pour empêcher les pluies violentes d'orages de trop faire jaillir la terre sur les fruits, et les salir.
(Cliché E. Gangloff)

Samedi 17 juin 1933
Fraises, Abricots… et Raisins.

Le monde des intéressés est dans l’attente des mesures réclamées contre l’invasion des abricots d’Espagne. Mesures qui, cette année du moins, n’auraient guère que le caractère de dispositions de principe, vu la menace de sous-production de la fraise qui semble se préciser, au moins en Lorraine, au fur et à mesure que s’avance la campagne 1933.
Par contre, nous apprenons que la Commission interministérielle de la viticulture s’est prononcée en faveur de mesures destinées à éliminer du marché les mauvais vins, et elle a demandé que les décrets définissant les vins normaux et fixant, par région, leur minimum de degrés alcooliques, interviennent avant le 15 juillet.
Selon la Commission interministérielle, tout en poursuivant énergiquement les moyens de défendre la viticulture contre le péril qui la menace, une rigoureuse répression des fraudes et la stricte application des décrets qui vont être pris, peuvent être considérés dans la situation présente comme des remèdes qu’il faut utiliser sans retard. (LL)

Dimanche 18 juin 1933
La récolte des fraises

La semaine qui vient de s’achever permet une esquisse de statistique sur l’importance de la récolte des fraises dans la campagne en cours.
Après n'avoir compris, au cours de la semaine précédente, que quelques wagons, les expéditions du Pays Messin se sont élevée d'une vingtaine de wagons le lundi 12 juin à une quarantaine hier. Evidemment, les envois sont de beaucoup moins importants que l'année dernière à la même époque, mais l'on sait que la production est elle-même nettement moindre cette année.
La pluie qui s'est décide à tomber; durant une bonne partie de la journée d'hier a été bien accueillie par les cultivateurs de fraises ; elle est de nature à améliorer les perspectives de la récolte pour les jours qui vont suivre, tant en quantité qu'en qualité, et à profiter surtout aux grosses variétés, qui parviennent maintenant à maturité.
Cette année encore, et en dépit de l'effort fait sur le marché suisse par les producteurs italiens, qui depuis deux ou trois ans ont développé leur production de façon incroyable, la fraise du Pays Messin a fait prime en Suisse : c'est la Suisse qui, à elle seule, absorbe la moitié de nos expéditions. L'autre moitié se répartit entre l'intérieur de la France et la Sarre. Quelques wagons ont été dirigés sur la région parisienne, et un train complet a pris la destination de Lille.
Les prix payés à la production ne sont toutefois pas ceux que le producteur était en droit d'espérer, vu la petite importance de la récolte jusqu'à ce jour, et plusieurs producteurs nous ont exprimé leur mauvaise humeur de constater que les prix demandés au consommateur sur la place de Metz avaient fait, pour le moins, la « culbute » entre temps, c'est-à-dire subi une majoration de 100 % et plus.
Nous ne pouvons que redire aux intéressés qu’il y a là, comme toujours, une question d'organisation qui leur incombe entièrement. (LL)

Mercredi 21 juin 1933
La récolte des fraises.
La récolte des fraises se poursuit dans des conditions de fatigue que ne soupçonne pas le public urbain : pieds dans la glaise et dos sous la pluie ; les doigts macérés par l’eau, et parfois même entamés… Et tout ce mal pour un résultat présentement assez médiocre, car si la pluie nécessaire est tombée en surabondance, c’est la chaleur non moins indispensable qui fait défaut aujourd’hui. Et cela ne profite qu'aux limaces, dont les dégâts sont d'autant plus considérables que ces vilaines bêtes ne s'attaquent qu'aux fruits suffisamment mûrs, et pas aux plus petits.
Quant aux prix, ils ne sont pas aussi rémunérateurs que le producteur l’espérait. A Woippy, où généralement les prix ont la meilleure valeur d'indice, ceux-ci ont subi, au cours de la semaine dernière, une régulière courbe descendante : 1 fr. 50 le 13 juin ; 2 fr. 25 le 14 ; 1 fr. 10 le 15 ; 1 fr. 05 le 16 ; 1 franc le 17. Les prix semblent avoir été un peu meilleurs dans diverses localités du sud de Metz : le 18 juin, elles étaient payées 1fr. 20 à Ars-sur-Moselle, avec paiement en surplus d'une prime de 5 centimes par le syndicat local.
Pour ce qui est de l’importance de la récolte au sud de Metz, qui commence maintenant à entrer en ligne avec ses variétés tardives, celle-ci est causée uniquement cette année par l'extension de la culture du fraisier : c’est ainsi que la gare de Novéant-sur-Moselle a enregistré samedi dernier le maximum d’expéditions jusqu’alors réalisé par elle, avec un total de vingt et un wagons. Il est vrai que cette gare dessert non seulement Novéant, mais les localités avoisinantes, dont certaines comme Marieulles, ont fait de gros progrès dans la culture des fraises. Il et difficile enfin, de faire entrer en ligne de compte l’importance toujours grossissante des expéditions par route : l’on voit couramment maintenant des camionnettes spécialement aménagées venir de Sedan, Strasbourg, Longwy, etc.
Il est vivement à souhaiter qu’un rétablissement du temps et une amélioration des conditions thermométriques permettent aux fruits maintenant ravitaillés en sève, la maturation désirable - et à ceux qui les cueillent, un travail moins pénible que celui qui vient de leur être imposé. (LL)


LES FRAISES DE WOIPPY
Les wagons de marchandises non aménagés, voyageant les fenêtres ouvertes, peuvent transporter 1 500 kg. de fraises et ceux qui ont été établis spécialement pour cet usage, avec des claies, transportent 3 000 kg. Naturellement la manipulation des paniers doit être faite assez délicatement et exige beaucoup de précautions au chargement. Beaucoup de fraises partent maintenant par camions et camionnettes pour les directions les moins éloignées. (Photo et cliché E. Gangloff)
Vendredi 23 juin 1933
La récolte des fraises.

Nos aimables correspondants nous permettront de nous égayer un peu de l'état d'esprit un peu pointilleux qui nous semble aller se développant au royaume de la fraise. On pourrait croire que nous allons à une guerre de Sécession renouvelée de celle qui, voici soixante-treize ans, dressait en Amérique Etats du Nord contre Etats du Sud. Nous avons donc, nous aussi, au Pays Messin, nos Sudistes et nos Nordistes : les premiers prompts à prendre ombrage des informations consacrées à la fraise de Woippy, les seconds enclins à se formaliser de ce qui leur paraîtrait tendre à discuter la souveraineté de ce qui fut la capitale avérée des fraisiéristes de Lorraine.
Il est un fait historique incontestable : c'est à Woippy qu'appartient l'initiative d'avoir, il y a pas mal de lustres, créé pour ainsi dire l'industrie de la fraise.
Il est un fait économique non moins certain : c'est que la culture de la fraise a rencontré, dans tout le Pays Messin, les terres propices à sa réussite, et les bras courageux qu'il lui fallait pour s'étendre comme elle l'a fait.
Que des différences de crus se manifestent, pour une espèce donnée, sous l’influence prolongée de l'exposition solaire, de la nature du sol, voire même des soins culturaux et fumures, cela nous paraît aussi évident pour le fruit du fraisier que ce l'est pour le fruit de la vigne. Mais on nous permettra de ne reconnaître, en tous ceux - citoyens et localités - qui vivent de la fraise, que des éléments pareillement précieux de la prospérité collective, et pareillement chers à nos cœurs.
La concurrence, là encore, amènera à la longue la discrimination qui l’accompagne inévitablement, et nous en verrons bien d'autres, sans doute, quand reprendra le mouvement de sélection d'espèces qui se fit jour voici quelques années, tendant à faire entrer en scène ce qu'en viticulture on appellerait des cépages nouveaux, variables en précocité, en sucre, etc., plutôt qu’en fertilité.
Quoi qu'il en soit, le « Lorrain » sera toujours heureux d'accueillir les renseignements que correspondants attitrés ou lecteurs bénévoles voudront bien lui faire parvenir au sujet de la campagne des fraises : fluctuation des prix, importance de la récolte, extension de la culture, débouchés, satisfactions ou déconvenues, etc. Leur publication ne peut que grandement servir la cause des cultivateurs de fraises, dont les Syndicats ont trop à faire pour songer à publier un bulletin corporatif, et qui trouveront en notre journal, demain comme hier, l'interprète et le défenseur le plus désintéressé.
Mettons donc aujourd'hui à l'honneur les Sudistes, justement fiers de leurs côtes et des qualités spéciales qu'y acquiert le fruit du fraisier.
Sait-on que les quantités récoltées l'an passé dans les cultures du sud de Metz ont atteint, tant à Arry qu'à Lorry-Mardigny, 60 000 kilos ; 65 000 à Marieulles ; 75 000 à Féy ; 90 000 à Corny ; 115 000 à Vezon ; plus de 120 000 à Novéant ? Des chiffres aussi intéressants que la plupart de ceux-ci peuvent être alignés pour Ancy, Jouy, Ars, etc., etc.
La gare de Novéant est devenue un centre d'expéditions dont nous avons déjà montré l'importance qui va se développant de jour en jour vu l’étendue de la zone desservie.
Cette année, évidemment, la récolte se trouvera de beaucoup inférieure à la récolte d'antan ; deux considérations pourtant sont de nature à atténuer le regret qu'on pourrait en avoir : cette pénurie relative permettra de moins durement ressentir la carence des fabriques de conserves, désemparées par la concurrence de l'abricot d'Espagne, et d'autre part elle assure à la production une meilleure tenue des prix.
Les prix réalisés durant la présente campagne sont, en effet, bien soutenus, et un correspondant de Lorry-Mardigny nous indique - à la livre - pour le 10 juin : 2 fr. 75 ; le 12 : 2 fr. 50 ; le 13 : 1 fr. 50 ; le 14 et le 15 : 1 fr. 20 ; le 16 et le 17 : 1 fr. 15 ; le 18 : 1 fr. 35 ; le 19 : 1 fr. 20 ; le 21 : 1 fr. 10. Le tout avec une ristourne minimum de 0 fr. 05 à la livre.
Dans le même temps, on obtenait à Ancy le 18 juin : 1 fr. 20, le 19 : 1 fr. 20 ; le 20 : 1 fr. ; le 21: 1 fr. 10 - avec espoir de hausse pour les jours suivants. Les prix, dans toute la région « sudiste » se sont tenus en concordance moyenne avec les prix ci-dessus détaillés ; on ne pense pas avoir à craindre qu'ils s`abaissent jamais au-dessous d'un franc à la livre, et les conditions particulièrement pénibles de la présente campagne, sur un sol détrempé et sous un ciel menaçant, rendent cette espérance particulièrement souhaitable pour tous ceux qui participent à la cueillette, d'autant plus harassante que le fruit est plus disséminé.
C'est remplir un devoir de stricte justice que de faire écho à la satisfaction que les intéressés manifestent à l'adresse des Syndicats reconstitués dans la plupart des localités, et dont le rôle bienfaisant finira, espérons-le, par ne plus rencontrer de sceptiques.
Rôle qui, d'ailleurs, ne prendra pas fin cette année avec la campagne des fraises : déjà s'amorce celle des cassis, ou groseilles noires, qui s'annonce dès maintenant comme assurée de prix plus rémunérateurs que sa devancière, en raison de demandes assez fortes qui laissent espérer des prix au kilo avoisinant 2 fr., contre 1 fr. 20 et même 1 fr. l’année dernière. Déjà aussi se formulent les premiers pronostics touchant la vendange : là où la gelée tardive n’a pas exercé ses ravages, la floraison très belle, l’imminence d’un retour du beau temps semblent autoriser les meilleurs espoirs.
Allons : il y a encore du mal à se donner pour la terre de Lorraine. Mais elle ne se montre pas ingrate, la terre maternelle. (LL)


Comme on le constate sur cette photographie, tout le pays est en mouvement. Voici un aspect de la mairie de Woippy au moment de l'arrivée et du départ des fraises.
La maison communale est transformée en Syndicat, où l'on achète les récoltes du jour au meilleur prix.
(Photo et cliché E. Gangloff
Dimanche 25 juin 1933
La récolte des fraises.

Avec bonne humeur du reste, une petite réaction - nous allions écrire « nordiste »- a suivi notre précédent article. Elle est d'ailleurs gentiment formulée, fort justement motivée, et nous sommes heureux de l'accueillir tout au long dans nos colonnes :
Je lis dans le « Lorrain » d'hier, 21 juin 1933, un article ayant pour titre « La récolte des Fraises », dans lequel il est dit que les prix des fraises semblent avoir été un peu meilleurs dans diverses localités du sud de Metz qu’à Woippy.
Ce n'est en effet qu’une apparence, et j'estime qu'il est indispensable de préciser la situation, afin que vos lecteurs, et surtout les producteurs sachent bien que les prix que vous indiquez pour Woippy se rapportaient à une variété précoce, moins grosse que la
« Tomate », tandis que ceux du sud de Metz, pendant les premiers jours, concernaient cette dernière variété qui n'était pas encore mûre à Woippy, et pour laquelle le producteur y est toujours payé nettement plus cher.
Compte tenu de cette considération, et à égalité de nature de fraise, les prix de Woippy n'ont donc pas été jusqu'ici inférieurs à ceux payés ailleurs, ils ont même été plus élevés pendant plusieurs jours.
J'ajoute que les producteurs du Syndicat ont su s’imposer une discipline nécessaire et mettent à tous leurs paniers une étiquette portant leur numéro d'immatriculation syndicale ; les acheteurs et les consommateurs y trouvent une garantie et des avantages réels qui leur donnent toute satisfaction et font qu'ils nous adressent des demandes toujours plus importantes.
Etant donné la présentation des prix faite dans votre article du 21 juin, je vous serais obligé de publier cet exposé dans vos colonnes le plus tôt possible. D'avance, je vous remercie et vous demande d'agréer, etc...
KOPP, Président du Syndicat des producteurs de fraises de Woippy.
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Les renseignements fournis d’autre part par l’Union des Syndicats de producteurs de fraises de la Moselle - dont le Syndicat de Woippy est d’ailleurs l’un des membres les
plus vigoureux - montrent qu’en effet, pour ce qui est de la variété précoce dont Woippy a gardé brillamment la spécialité, la récolte en est presque terminée. Soit dit en passant, il est donc possible aujourd'hui d'en apprécier le rendement assez exactement : tant en raison des fortes gelées d'avril que de la température défavorable en mai, la réduction de récolte de cette variété peut être estimée sans exagération à au moins 30 à 50 % de celle de 1932.
C'est maintenant avec la « Tomate » et la fraise tardive, qu il y a lieu de compter. Pour les cultures de Woippy, l’on s’attend à voir la grosse fraise inférieure en production d’environ 15 % par rapport à l’an dernier. La réduction de récolte sera vraisemblablement plus sensible encore en ce qui concerne la fraise tardive : cette variété - celle à laquelle s'intéressent plus particulièrement les fabriques de conserves - semble devoir accuser un rendement réduit de 30 à 40 % par rapport à celui de l'an passé, car elle a beaucoup souffert des intempéries.
A quelque chose malheur est bon : cette réduction - toute relative - de la production présente, tant pour Woippy que pour l'ensemble du Pays Messin, l'avantage d'une remarquable tenue des offres, qui sont supérieures à la demande, si nous en croyons le...
Mais nous allons laisser la parole, ou plus exactement passer la plume à la personnalité la plus qualifiée, par son dévouement et sa compétence, à traiter de ce qui va suivre : M. Henri de Ladonchamps. Voici donc ce que nous écrit le sympathique président de l'U.S.F.M. :
Une révélation !…
Le Bulletin corporatif syndical des Producteurs de Fraises de la Moselle
Le « Lorrain » du 23 juin, au cours de son exposé sur la récolte de fraises, lançait le mot de « bulletin corporatif » auquel, écrivait-il, les Syndicats ont trop à faire pour songer à le publier.
Ah ! certes, la tâche est rude et grande en ce moment. MAIS !… IL EXISTE BEL ET BIEN, LE BULLETIN !…
Chaque soir, par les soins de l'Union, il est adressé à tous les présidents de Syndicats qui lui ont donné leur adhésion, rédigé à 18 heures, il contient, les dernières nouvelles du jour et surtout les renseignements concernant la situation des marchés français et étrangers du matin même : nombre de wagons arrivés, prix de vente, état des marchés, tendances, etc., il donne de plus quelques considérations d'ordre général sur les ventes et la situation de la production en Moselle.
Donc, chaque matin, les Syndicats adhérant à l'Union sont renseignés par écrit sur la situation de la veille et qui, sur demande ou lorsqu'il est urgent, a déjà été transmise par téléphone dans la matinée même du jour d'arrivée.
Cette organisation présente de réels avantages que chacun constate et reconnaît.
Plus encore. L'Union des Syndicats établit un Bulletin de situation de récolte qui est envoyé à tous ses clients ; ce service, récemment formé, se développera. Le dernier bulletin en date du 22 juin, dont nous envoyons un exemplaire au Lorrain, a eu un tirage important et a été envoyé aussi aux représentants des expéditeurs.
Sans exagération, on peut dire que l'avenir des producteurs et des Syndicats qui les représentent, dépend de la façon et de la rapidité avec lesquels les uns et les autres sauront se placer, se discipliner et agir dans le cadre de l’Union. Précisément, en raison de l'extension des cultures dans la région de Metz, chacun, membre ou président d'un Syndicat, doit bien se pénétrer de cette idée et se rendre compte qu'il n'est plus possible d'agir seul, sous peine de travailler contre l'intérêt général… seul, ignorant la situation et sans tenir compte des contingences d'ensemble qu’il faut d’ailleurs suivre de très près et de façon constante, pour les interpréter utilement, seul et vendant peut-être plus cher tel ou tel jour, croyant alors avoir réalisé un exploit et en tout cas une bonne affaire, mais ballotté et secoué le reste du temps au gré des vagues, qui soulèvent, bousculent et agitent les marchés en tous sens, jouet isolé d’éléments qui lui échappent et qui, voguant au milieu des écueils, fatalement doit se briser contre eux.
L'Union des Syndicats de producteurs de fraises est 1'organisme de liaison et de groupement entre tous et indispensable à tous. Elle ne connaît ni nordistes, ni sudistes ; elle défend les intérêts de tous avec la même impartialité, la même objectivité, la même volonté d'être utile à tous, elle centralise les commandés et les répartit entre les différents Syndicats qui lui fournissent et fait charger pour eux des wagons, soit au Nord, soit au Sud de Metz, selon localités productrices et gare la plus rapprochée de celle-ci ; son système d'étiquetage créé, mis au point et appliqué par elle pour la première fois en Moselle ; dès 1928, permet non seulement de retrouver immédiatement le producteur, mais d'identifier instantanément le Syndicat fournisseur ; lorsque plusieurs ont participé à la composition d'un wagon, et même si les paniers des différents Syndicats sont mélangés dans les wagons.
L'Union des Syndicats de producteurs de fraises ne connaît que « la fraise de la Moselle », elle ne connaît que le « Producteur de la Moselle » avec un « P » et, par cette majuscule, nous voulons en même temps que caractériser et affirmer la généralisation que nous faisons de sa cause, nous voulons aussi saluer toute la noblesse de son rude labeur, penché sur la terre qu'il travaille et, qu'avec lui, ardemment, nous aimons ! H. DE LADONCHAMPS, Président de l'Union des Syndicats de producteurs de fraises et autres fruits de la Moselle.

Nous aurions aimé pouvoir donner la reproduction clichée de l'intéressante affiche par laquelle l’Union des Syndicats a fait, dans un grand rayon, la plus adroite et opportune des propagandes aux fruits dont elle s’est donné à tâche d'assurer la production rémunératrice. Faute de place, nous nous bornerons à la reproduction de son texte. Ce sera la meilleure conclusion du présent article, pour la preuve qu’elle donne : aux consommateurs, des garanties de qualité que leur assure le Syndicat ; aux producteurs, de la sécurité que leur garantit l’organisation éprouvée qui s’appelle l’Union des Syndicats des producteurs de fraises et autres fruits de la Moselle :
La Santé par les Fruits !
Voici en juin les savoureuses fraises de Metz (Moselle), le plus grand centre français de production, fournissant les variétés les meilleures et les plus recherchées pour la table, pour les confitures, pour les usines de conserves et pour la distillerie : gros fruits, chair juteuse, parfum incomparable, résistance au transport.
Livraison directe de la production. Expédition chaque jour par trains spéciaux sur tous les grands marchés français et étrangers. Fourniture et détail sur place (même à partir d'un panier) aux camionnettes et aux touristes.
Tous nos paniers doivent être munis d'une étiquette portant la marque départementale d'origine et de contrôle.
En juillet, groseilles ; en août, mirabelles de haute réputation.
Pour tous renseignements et pour les commandes, écrire au président de l'Union des Syndicats des producteurs de fraises et autres fruits de la Moselle, à Woippy (Moselle). Téléphone : Metz, 16.10. (LL)

Samedi 1er juillet 1933
La fraise en Moselle

La culture de la vigne, qui donne depuis quelques années des résultats si aléatoires, et contre laquelle s’acharnent, dans notre région, tant de fléaux – maladies cryptogamiques, gelées printanières, méventes du vin de Lorraine, si agréable, si parfumé, supplanté par le gros pinard du Midi - a été, dans la vallée de la Moselle, avantageusement remplacée par la culture de la fraise. Les débuts en furent d'abord timides dans les coteaux qui avoisinent l'ancienne frontière, mais devant les résultats, les plus hésitants se mirent à l'œuvre, et, au découragement qui menaçait d'assaillir nos vignerons, succéda bientôt la satisfaction devant les résultats obtenus.
Parmi les coteaux qui se prêtent particulièrement à la culture de la fraise, ceux de Novéant méritent une mention particulière ; ce fruit si délicat trouve dans le sol de notre terroir, les éléments indispensables pour l'amener à une parfaite maturité, tout en lui conférant une solide constitution, qui en autorise la conservation et le transport à longue distance, sans déchet ; et ces qualités sont appréciées au loin, car à l'époque toute récente où l'exportation pouvait encore se faire en Allemagne, un journal rhénan, passant en revue les pays producteurs, situait en bon rang « la fraise renommée(berühmte) de Novéant.
La gare de Novéant présente en ce moment une animation extraordinaire : c'est là qu'affluent, en outre, les fraises des villages d'alentour : Dornot, Ancy, Jouy, Corny, Marieulles, Lorry, Arry, etc.; depuis le 18 juin, il a été expédié par la gare de Novéant 345 wagons chargés de 2 tonnes à 2 tonnes et demie, avec une moyenne de 35 wagons dans une journée : au total, plus de mille tonnes de fraises expédiées.
Nous tenons donc une bonne place dans la culture de la fraise, à la grande satisfaction de nos producteurs. Leur émotion a cependant été grande quand, au milieu du mois, des chaleurs excessives menaçaient d'anéantir la récolte ; les pluies qui sont survenues si à propos ont tout remis au point, la récolte a été légèrement inférieure aux années précédentes, mais nous avons trouvé une compensation dans l'amélioration des prix, qui se sont maintenus rémunérateurs jusqu’à maintenant. Et si l'Allemagne, sur laquelle on comptait tant, a fermé ses frontières, l'exportation a trouvé d’autres débouchés, tant à Paris, que vers la Suisse. En résumé, nous saurons nous passer de l’Allemagne, et c’est fort bien. (LL)

Mardi 4 juillet 1933
La saison des fraises touche à sa fin

Les petits paniers, qui par milliers ont porté au loin les bonnes fraises du Pays messin, vont avoir droit au repos. La saison, en effet, touche à sa fin, et, dans une huitaine, l'armée des cueilleurs et cueilleuses aura abandonné les champs de fraises.
Quel sera le bilan de la récolte de 1933 ? A plusieurs reprises, le « Lorrain » a rendu compte des transactions dans le Pays messin, de même que des débouchés offerts par la présente année. Pour aujourd’hui, retenons surtout que si les prix n'ont pas connu les soubresauts qui désorientent les producteurs, la récolte a été nettement déficitaire dans toute la France, de même qu'en Suisse. On en connaît la raison : les gelées printanières, puis le temps frais persistant qui ne favorisait pas la maturation des fruits. Pour les fraises tardives, on évalue le rendement à 50 % seulement. La Suisse – nous venons de le dire – qui a connu le même ralentissement dans la production, a dû importer davantage pour couvrir ses besoins, et de 70 % d'importation en 1932, elle est passée cette fois à 100 %, ce dont les producteurs français ne se plaindront pas. La fin de saison a évidemment sa répercussion sur le marché, et dès samedi, une hausse des prix a été constatée, surtout pour la grosse variété. La demande reste bonne, et les prix vont probablement se maintenir pendant la semaine.
Nous ne pouvons mieux illustrer la situation actuelle du marché des fraises, qu'en reproduisant le « Bulletin » ci-après, établi dimanche par M. de Ladonchamp, l'actif président de l'Union des syndicats des producteurs de fraises et autres fruits de la Moselle :
Evolution de la récolte. - Jusqu'ici, la récolte s'est déroulée à une cadence restant sensiblement régulière ; ainsi qu'il avait été prévu dans le précédent bulletin du 22 juin, les très fortes journées de cueillette des années antérieures ne se sont pas produites en 1933.
Les plus grands rendements quotidiens de cette année - et ils sont restés relativement faibles - ont eu lieu les 26, 27 et 28 juin, avec seulement quelques wagons de plus que les jours précédents ; puis, et ainsi qu'une visite faite dans les différentes gares d'expéditions a permis de le constater à quai, brusquement les expéditions baissent d'environ un tiers le 29, puis de 50 % le 30, et davantage encore le 1er juillet.
Etat de la récolte à ce jour. - Plusieurs localités préviennent qu'elles finiront probablement de cueillir le mardi 4 juillet. Pour d'autres localités, il semble que l'on pourra arriver à la fin de la semaine, mais en décroissant très rapidement et de saut en saut vers la fin. La courbe de production présentera probablement chaque jour un angle de chute très prononcé pour s'arrêter brusquement.
Conditions de transport. - En raison de la basse température des nuits, qui oscille entre 14° vers 20 heures, et 8° vers 6 heures du matin, les fruits voyagent dans de très bonnes conditions.
Demandes. - Elles restent nombreuses et très supérieures à l'offre.
Prix. - La hausse prévue dans le bulletin du 22 juin s'est produite ; en fin de semaine, les prix ont atteint, dans certaines localités, 295, 300 et 310 francs les 100 kg. sur rail.
Temps. - Il a été conforme aux prévisions antérieures. Du 22 au 28 inclus : pluies incessantes, vents et froids vifs le matin, ciel gris et sans soleil ; le 29 juin a été le premier jour sans pluie depuis deux semaines ; très forte pluie le 30 juin ; beau temps mi-couvert le 1er juillet. Prévisions du temps pour la semaine en cours. - Ciel se dégageant ; pluies rares et disparaissant ; retour possible au beau temps ; température en hausse, mais nettement inférieure à la normale ; orages à craindre.
LA BONNE QUALITE DES FRAISES
Dans le monde entier, on parle de crise due à la surproduction, et pour sortir de l'impasse économique, on propose de remplacer la quantité par la qualité. Les adhérents de l'Union des Syndicats n'ont pas attendu ces bons conseils pour conserver aux fraises lorraines le renom qu'elles méritent. En 1928, Woippy créait un système de fiches, permettant à l'acheteur d'identifier le producteur en cas de réclamation. Deux ans après, l'Union des Syndicats appliqua la méthode, qui, aujourd'hui, a fait ses preuves. Voici d'ailleurs ce que M. de Ladonchamp écrivait avant-hier aux adhérents de l'Union :
« Le président de l'Union des syndicats à MM. les présidents et aux membres des Syndicats unis, la copie d'une lettre qu'il a reçue ce matin de l'une des plus importantes maisons d'achat de fraises. Cette lettre dit :
« Nous vous prions de transmettre à vos adhérents nos compliments pour la façon avec laquelle tous ont travaillé cette année. Vos expéditions étaient très bien et nous sont parues en parfait état.
« La méthode que vous employez en obligeant vos adhérents à mettre sur les paniers des étiquettes à identité, est bonne. Ceci fait apporter plus d'attention et de soins à tous, et nous avons remarqué que votre méthode est bonne. »
Ce n'est pas seulement avec joie, mais aussi émotion, que le président de l'Union des syndicats publie cette communication ; il y ajoute ses félicitations personnelles les plus cordiales.
L'étiquetage des paniers à fraises est, en Moselle, la création et l'œuvre de l'organisation syndicale.
De très réels efforts ont été faits par les producteurs à bien des points de vue, et spécialement pour l'étiquetage et le paillage. Malgré des pluies incessantes pendant deux semaines, les fruits sont toujours restés nets de toute souillure. Ces efforts, le président de l'Union des Syndicats les suit pas à pas, il les connaît et les partage.
Continuons ! Ayons l’amour-propre du métier. Ayons l'esprit de corps syndical.
Continuons ! Nous sommes dans la bonne voie !
Succès oblige!... Ensemble coude à coude et la main dans la main, demain, toujours continuons... persévérons… »
LES PRIX A BERLIN
Terminons ce rapide aperçu par les prix pratiqués actuellement à Berlin. Ce coup d’œil sur le marché allemand n'est pas sans intérêts, puisque de plus en plus nos voisins d'en face prétendent se suffire à eux-mêmes. Ces prix, nous en devons encore la communication à M. de Ladonchamp qui, pour mieux défendre la cause des producteurs du pays messin, se tient journellement au courant de la situation des marchés dans les différents pays.
Dans les environs de Berlin, la fraise, première qualité, se vend en gros de 36 à 50 Marks les 100 kilos.
Les fraises non triées valent 24 à 30 Marks les 100 kilos. Les prix de la capitale allemande sont donc inférieurs à ceux pratiqués dans notre région et auxquels il faut encore ajouter, si l'on envisage l'exportation au-delà du Rhin, des frais de douane et de transport assez onéreux. Ces prix allemands pourront-ils se maintenir (la récolte berlinoise est plus tardive que la nôtre)? On peut en douter, si l'on en croit les journaux allemands qui prédisent une récolte très abondante.
Quant à nous, nous sommes heureux de constater les bons résultats obtenus par l'Union des Syndicats du Pays messin.

23 juillet 1933

Woippy (Moselle) est le pays de la fraise ; 600 wagons ont été expédiés durant la saison 1932, mais notre gravure
montre que ceux qui cultivent ce fruit délicat savent aussi l'apprécier.

Mardi 20 mars 1934
Syndicat des producteurs de fraises.
– Nous informons les membres du syndicat qui ont le privilège des posséder des jeunes plants de fraisiers, dont les fruits se nomment « Belle de Woippy », que l’hiver n’a pas détruit les jeunes plants et si leur aspect est un peu maladif, les fruits, gros et roses qu’ils porteront, leur donneront la joie.
Le comité du Syndicat, dont M. Kopp Jean est le président actif et auquel s’est joint M. de Ladonchamps, président de l’Union des Syndicats des producteurs de fruits de la Moselle, a décidé la construction d’un bâtiment, place du Champé. Ce bâtiment comprendra notamment un bureau, une salle de vente et d’achat, une bascule automatique. Le budget de 1933 est favorable et un compte rendu avait été donné le 11 février dernier à l’assemblée générale. Des détails, les prévisions de récolte et projets de réorganisation seront communiqués ultérieurement.

Dimanche 20 / Lundi 21 mai 1934
L’histoire des plantes. La fraise.

La fraise (fruit de fragaria vesca) est originaire du Chili. C'est au début du XVIII° siècle que M. FREZIER, au cours de ces voyagea en rapporta quelques pieds dans notre pays ; mais ce n'est que cinquante ans plus tard que les fraises firent leur apparition à Paris.
Louis XIV, qui appréciait beaucoup la saveur des fraises, favorisa leur culture et son célèbre jardinier La Quintinie obtint dans les potagers de Versailles de magnifiques spécimens de ces fruits. Il s’employa même à la culture et à l'amélioration de la fraise des bois.
Avant nous, les Romains connaissaient la fraise qu'ils appelaient « fraga », de ce nom est venu le verbe « fragare » qui signifie sentir bon.
Outre son arôme particulier la fraise contient des acides malique et citrique, des sels de chaux, du mucilage et du sucre. Ces éléments heureusement combinés lui donnent cette propriété tempérante que possèdent en général les fruits doux comme la framboise et la cerise. Pour ces raisons ils sont recommandés aux tempéraments bileux et sanguins, dans la jaunisse, dans les catarrhes pulmonaires et dans les bronchites avec tout sèche.
Les convalescents trouvent dans la consommation des fraises un rafraîchissement agréable, surtout après les inflammations, après les fièvres putrides ou bileuses.
Il fut un temps où médecins conseillaient les fraises aux goutteux, aux rhumatisants et aux phtisiques.
Certain praticien ordonnait à ses élégantes clientes des lotions au jus de fraises pour entretenir la fraîcheur de leur teint, de là les parfumeurs eurent l'idée de faire entrer les fraises dans la fabrication de leurs cosmétiques.
On sait que Linné, le célèbre naturaliste suédois qui souffrait de la goutte, au point d'interrompre ses travaux, fit, sur les conseils d'un médecin, une cure de fraises. Dès la première année, il éprouva un soulagement, les années suivantes il suivit le même régime (fraises à tous les repas pendant la saison) et au bout de quatre années il fut complètement guéri.
Nous pouvons donc considérer la fraise, depuis la petite fraise des bois jusqu'aux plus belles variétés cultivées, comme un dessert aussi utile qu'il est agréable. Cependant elle ne convient pas toujours aux dyspeptiques, aux diabétiques et aux obèses, certains estomacs ne la tolèrent pas.
La racine du fraisier est employée en tisane, dans les hémorragies et la dysenterie, elle a des propriétés légèrement astringentes. Les feuilles ont des qualités analogues, elles procurent un excellent diurétique; on en fait une infusion, propre à remplacer le thé. («Action Agricole»). LOYSE. (LL)

Mercredi 23 mai 1934
… Et voilà les fraises.

« Quand de Juin s'éveille le mois, allez voir les fraises des bois », dit le poète. Point n'est besoin d'attendre les premiers jours de juin pour voir les fraises. En effet, elles rosissent et mûrissent d'une façon très précoce et ce, malgré un hiver très rigoureux et très tard.
Cette saison ne s'annonce cependant pas très favorable aux producteurs. Nombreux sont les fraisiers de l'espèce dite « des cirarées », et surtout de celle des « tomates », qui ont péri à la suite de l'hiver trop sec et trop froid. Les plants qui ont résisté sont restés chétifs et n'ont donné que de rares fleurs blanches. La gelée nocturne de la semaine dernière leur fut également néfaste, surtout dans la plaine, mais ne toucha que d'une façon anodine l’espèce des printanières.
Malgré ces vicissitudes, les producteurs de fraises ne perdent pas courage : ils procèdent actuellement à un dernier piochage et au paillage des champs, et ce avec diligence, car avant huit jours, les rues du village de Woippy seront animées par la foule des vendeurs et des acheteurs de fraises. Groupés derrière les dirigeants de leur Syndicat, les producteurs regardent avec confiance l'avenir. (LL)

Mardi 29 mai 1934
La cueillette des fraises est ouverte. La première journée a été très bonne pour la vente et pour l'achat. Le Syndicat des producteurs vend aux touristes et consommateurs, des fraises en paniers de 3 kg. ; ils peuvent s’en procurer un ou plusieurs à un prix raisonnable. Samedi prochain, première journée de la vente au détail. (LL)

Mardi 5 juin 1934
La récolte des Fraises.

Les pluies qui ont marqué les derniers jours de la semaine passée ont apporté le salut aux fraisiers assoiffés, et donné l’espoir de voir aller à bien la formation et la maturation des fraises qui avaient pu « nouer » en dépit des gelées tardives et des sécheresses précoces.
En tout état de cause, la récolte 1934, sera une petite récolte, et l'approximation que nous en donnions, dans un précédent article se trouve vérifiée : c'est tout au plus si certaines plantations plus avantagées sont en mesure d’espérer une demi-récolte…
C'est ce qui explique, sans doute, la belle tenue des marchés étrangers preneurs de la fraise de Metz. Vendredi dernier, trois wagons parvenus de Woippy sur le marché suisse y ont été vendus - en francs suisses ! - jusqu'à 1,40 le kilo. Et hier encore, notre fraise s'y vendait couramment 1 fr. 20 le kilo (francs suisses). En outre, les transactions sont très actives et la demande est forte.
Paris est également le marché avantageux pour nos producteurs : la fraise de Metz s'y prenait samedi à un moyenne de 440 fr. aux cent kilos, et dimanche cette moyenne s’élevait à 450 fr. La fraise de Bretagne, il est vrai, se vendait de 480 à 560 fr. les cent kilos.
Une chose qui intrigue fortement nos producteurs, c'est la différence des prix qui leur sont payés selon la diversité des points du Pays Messin, à qualité égale s'entend. C'est ainsi qu’on remarquait entre Novéant et Woippy, par exemple, un écart qui, si nos renseignements sont exacts, n’atteindrait pas moins de trente centimes par kilo. Il en était du moins ainsi le 30 mai, où la fraise aurait été payée de 1 fr. 50 à 1 fr. 60 la livre à Novéant contre 1 fr. 75 à Woippy. Cette différence, qui se maintient et aurait plutôt tendance à s'accentuer, fait dresser l'oreille, aussi bien aux producteurs du sud de Metz qui constatent ce manque à gagner qu’à ceux de Woippy, qui auraient tendance à reconnaître là une manœuvre dirigée contre leur syndicat.

Jeudi 7 juin 1934
Le prix des fraises à Woippy
Le prix d’achat des fraises au producteur a sensiblement diminué.
Voici les prix de ces jours derniers ;
Lundi : 2 fr. 40 à 2 fr. 50 le kg ;
Mardi : 2 fr. à 2 fr. 20 le kg ;
Mercredi : 2 fr. 10 environ le kg. (LL)

Vendredi 8 juin 1934
Une réponse. Le prix des fraises.

Nous recevons la lettre suivante :
Vous avez fait paraître dans le numéro du 5 juin 1934 un article intitulé : « Le Prix d’achat de la fraise varie curieusement d’une localité à l’autre » que notre Syndicat ne peut laisser passer sans protester. Une mise au point nous semble nécessaire, car les indications que vous donnez risquent de déterminer chez les producteurs de fraises un état d’esprit hostile aux acheteurs, et de causer ainsi un préjudice certain aux uns et aux autres, producteurs et acheteurs ayant tout intérêt à s’accorder pour tirer le meilleur parti de la récolte.
Nous nous permettons en conséquence de citer à vos lecteurs les cours officiels sur les différents marchés.
Aux Halles de Paris, et il est facile de vérifier ces chiffres au Service de l’inspection des Halles, les fraises de Metz se sont vendues dimanche dernier de 350 à 400 fr. les 110 kg., et non pas 450 fr. comme on vous l’a rapporté à tort. Le lundi les Halles étaient fermées, et le mardi le cours était de 200 à 300 fr., soit une moyenne de 250 fr. De gros acheteurs de la région parisienne ont acheté des quantités considérables à 220 fr. par 100 kg., en lots de 9 à 10 tonnes.
Or, il y a lieu de déduire de ces prix bruts de vente, les frais considérables qui sont à la charge des expéditeurs de la région, et des acheteurs parisiens, frais qui ne sont pas inférieurs à 100 f. par 100 kg. : transport par chemin de fer, camionnage de la gare de l’Est aux Halles, rétribution réglementaire aux « forts de la Halle », frais de vente, etc, etc… Un calcul rapide vous amènera à constater que le bénéfice des expéditeurs et revendeurs est extrêmement mince, quand il existe. En fait, beaucoup d’entre eux ont subi ces jours-ci de lourdes pertes.
Pour la Suisse, la situation est analogue. Si les cours sont plus élevés, les frais sont encore plus considérables, en raison de la distance plus grande et des droits de douane élevés. Si pour les importateurs autorisés, le droit est de 2 fr. suisses par 100 kg., pour les importateurs ordinaires le droit est de 20 fr. suisses, soit 100 fr. français. Or, mardi matin, sur les marchés suisses, la fraise de Metz se vendait de 70 à 80 centimes suisses le kilo. Nous sommes donc loin des cours de 1 fr . 20 et 1 fr. 40 qui nous ont été indiqués.
Il est certain que l’on pourrait à bon droit espérer des cours plus élevés, la récolte étant peu abondante. Mais malheureusement en sus du marasme dont souffrent tous les genres de commerce, des circonstances particulières font que l’écoulement de la production locale en fraises est difficile cette année. En effet, il se trouve que cette année, notre récolte est en avance d’une bonne dizaine de jours, alors que dans d’autres régions un phénomène inverse se produit. Si bien que sur le marché suisse par exemple, les fraises de Metz arrivent en même temps que celles de Carpentras, de Lyon et de Saint-Rambert d’Alban, et que des envois massifs de fraises d’Italie. Sur le marché parisien, notre production lutte en outre, contre la concurrence des fraises de Montauban et de Bretagne.
Nous espérons que ces quelque explications permettront à vos lecteurs de se faire une opinion plus complète sur la question, et de comprendre que le rôle des membres de notre syndicat comporte de grands risques pour des profits aléatoires. Nous aimerions que les producteurs, au lieu de voir en nous des adversaires, nous considèrent comme des auxiliaires occupés à leur procurer des débouchés toujours plus larges et faire triompher la qualité mosellane sur les marchés les plus lointains.
Le président du Syndicat des Expéditeurs en fruits de la Moselle : Maurice CHATAM. (LL)

Dimanche 10 juin 1934
Vicissitudes et écarts des prix des fraises.

Le Syndicat des expéditeurs en fruits de la Moselle, sous la signature de son président, M. Maurice Chatam, proteste dans le « Lorrain » du 9 juin contre différents faits et cours des grands marchés des fraises cités par ce même journal dans son numéro du mardi 5 juin. On ne peut que constater que cette protestation ne prouve pas ce qu’elle établit.
Tout d’abord, il doit être remarqué qu’en raison de sa date de parution, l’article mis en cause avait été imprimé le lundi 4 juin ; les prix qu’il cite ne pouvaient donc se rapporter qu’à la semaine qui venait de se terminer et jusqu’au lundi 4 inclus. Dès lors, on ne voit pas bien comment pour les contester, on s’appuie sur les prix de vente du mardi 5, donc postérieurs à l’article, et qui ne pouvaient conditionner les prix payés au producteur qu’à partir du 6 et après cette date.
Quant au marché de Paris, les halles étant fermées le lundi, il y arrive le mardi deux jours de cueillette envoyés par plusieurs centres de production. Le mardi est donc le jour où le marché de Paris est toujours le plus fragile à tous points de vue et où les prix sont en général les plus bas avec répercussion sur le mercredi ; il faudrait donc s’efforcer de le décharger en expédiant le plus possible sur d’autres places tous les lundis et mardis et ce n’est pas sur les résultats d’un mardi qu’on peut baser les possibilités de la semaine. La Bretagne ne peut encore être mise en cause, car elle n’a fait que peu d’expéditions sur Paris jusqu’ici, le première devant remonter à dimanche dernier et d’ailleurs le centre de production bretonne, soucieux précisément d’alléger la capitale, se prépare après avoir expédié presque tous ces derniers jours sur l’Angleterre à faire des envois jusqu’à Nancy et Strasbourg !
Peut-être aurait-on pu expédier davantage le fraise de Metz sur la province avant le 6 juin et spécialement le lundi 4. En tous cas, le train spécial sur le Nord de la France, mis en marche dès à partir de 5 wagons, n’avait pas encore circulé à cette dernière date. Pour en terminer avec Paris, constatons que si le Service d’inspection des Halles indiquait le cours de 350 à 400 fr. les 100 kg. pour le dimanche 3 juin, par contre le commissariat des Halles mentionnait à la même date les prix de 450 à 550 fr. pour la fraise de Metz.
Enfin le Syndicat des expéditeurs ne conteste pas la « curieuse différence de prix » payée au producteur selon les localités pour une même journée et que le « Lorrain » mentionnait atteindre jusqu’à 0, 30 au kg. pour une même journée ; cette différence a donc bien existé et cependant il nous est communiqué à l’instant qu’il est des cas où la distance des gares et une différence de qualité ne sauraient être mises en cause. Nous demandons donc une fois de plus après tant d’autres, que l’on s’efforce d’unifier les prix et nous demandons pourquoi, si nos renseignements sont exacts, les dépôts de ramassage du président du Syndicat des expéditeurs lui-même, ont fait annoncer aux producteurs de Jouy-aux-Arches qu’ils leur payaient 2 fr. la livre les 31 mai, 1er, 2 et 3 juin, prix d’autant plus déroutants, étant donné la situation des marchés. L’Union des Syndicats de producteurs demande encore et plus instamment, que soit donnée par les membres du Syndicat des expéditeurs l’indication des prix payés par eux aux producteurs qui leur ont fait des livraisons et cela sans attendre que les Syndicats de producteurs aient payé eux-mêmes ou fait connaître leur prix pour ce que les producteurs leur ont livré à eux-mêmes. Chacun de ces organismes, expéditeur et producteur a traité avec le producteur une affaire nettement différente et doit payer d’après les possibilités que lui permettent les résultats de ses ventes personnelles.
En terminant, nous nous étonnons et ne pouvons accepter que le président du Syndicat des expéditeurs avance gratuitement les mots d’état d’esprit hostile aux acheteurs de la part des producteurs et qu’il dise que ces derniers voient en eux des adversaires, nous sommes certains au contrarie que s’il obtient ces deux résultats depuis si longtemps demandés : unification et indication dans les condition sus-dites des prix payés par les membres du Syndicat des expéditeurs, tous les producteurs auront deux motifs de plus de les considérer comme de meilleurs auxiliaires encore.
H. de Ladonchamps, Président de l’Union des Syndicats de producteurs de fraises et autres fruits de la Moselle. (LL)

Jeudi 14 juin 1934
Vol de fraises : Depuis quelques jours, plusieurs producteurs de fraises s’étaient plaints de la disparition d’une partie des fraises qu’ils se proposaient de cueillir incessamment. Plusieurs fois ils eurent la désagréable surprise de constater un vol audacieux sans pouvoir apercevoir le ou les coupables.
Nous savons que notre garde champêtre et notre policier sont très vigilants, mais ils n’ont pas réussi à mettre la main sur les voleurs. Hier, un producteur de fraises, M. M., également membre du Syndicat des producteurs de fraises, surveillait ses champs à l’heure du dîner, il vit arriver deux femmes chargées de seaux qui, abandonnant leur bicyclette, se mirent à cueillir des fraises dans le champ voisin, comme si elles étaient les propriétaires. Leur plaisir fut de courte durée ; notre bon producteur les saisit au bras et les ramena triomphalement au village, où il s’assurait de leur identité avant de les livrer au propriétaire du champ, où les fraises avaient été dérobées. (LL)

Mercredi 27 juin 1934
Les vols de fraises. Au cours de la cueillette des fraises, et en particulier pendant ces deux dernières semaines, huit procès-verbaux ont été dressés pour vol de fraises. (LL)

Der Sonntag - 15 juin 1934 - N° 12.





„Ernte“ in Woippy – 600 Wagons Erdbeeren

Es gibt wieder Erdbeeren! Mit Wonne geniesst der Feinschmecker dieses Wort. Schon die Vorstellung der roten, verlockenden Früchte, so zuckersüss, lässt einem förmlich das Wasser im Mund zusammenlaufen. Und der glückliche Besitzer eines Gartens wird die ersten selbst pflücken. - Eigenprodukt. Viele andere aber lassen sich von den Auslagen der Obsthandlungen verführen. Wenn schon der Feinschmecker Freude daran bat, die Erdbeere « wieder zu haben », wieviel mehr muss da erst jener befriedigt sein, der von der Produktion, vom Verkauf des süssen. Obstes lebt, für den das Geraten oder Nicht-Geraten fast eine Lebensfrage ist.
Es war wohl nicht der Zufall, der uns in diesem Erdbeeren-Monat in die Gegend von Metz führte, ins « Erdbeerland » Woippy. Nicht immer war Woippy ein Erdbeerland. Vor langen Jahrzehnten wurde hier noch die Rebe gepflanzt, allerdings mit wenig einträglichem Erfolg. Heute sieht man nur noch hie und da einige Rebgelände um das idyllische Dorf herum. Die Traube ist verdrängt durch die Erdbeere. Zur deutschen Zeit war ganz Deutschland Abnehmer von Woippy-Erdbeeren und so blühte diese Kultur schnell auf in der Gegend. Und auch heute noch gleichen die Felder in Woippy einem grossen rot und grün durchwirkten Teppich, über welchen zur « Ernte » - Zeit Männer, Frauen und Kinder gebückt sind zur « Cueillette ». Erdbeerzeit ist für Woippy « Ernte » und « Herbst ».
Wir schreiten durch die Strassen und Gassen des Dorfes. Man sieht keinen Menschen in den Gehöften, an den Türen. Jung und Alt, Gross und Klein ist ausgeflogen zur Erdbeerpflücke. Und diesem guten Beispiel folgen auch wir. Auf jedem Acker finden wir Frauen, Kinder mit dem weissen Schindelkörbchen. Emsig gehen die Hände, gleiten unter die grünen Blätter, brechen Früchte von verführerischem Rot. Das Auge dieser « Schnitter» ist geübt. Alle reifen und nur die reifen Früchte werden gebrochen, wandern ins Körbchen, das sich langsam füllt. Das volle Körbchen wird in den speziell hergerichteten Rückkorb gestellt, mit welchem dann die Körbchen aus dem Erdbeeracker herausgetragen werden zur Weiterverladung auf einen Pferdewagen, einen Handkarren oder auch ein Auto, das die süsse Frucht gleich über Land befördert.
Um Mittagszeit nimmt man sich nicht mehr die Zeit, zum Mittagsmahl nach Hause zu eilen. Aus der Faust, bei gutem Appetit wird rasch ein frugales, kaltes Mahl eingenommen. Und dann geht's wieder an die « Cueillette ». So bis zum späten Abend. Derweil Frauen und Kinder dem Hause zu eilen, fahren die Männer den Tagesertrag zum Syndikat. Denn wie alle Klassen, die um ihr tägliches Brot kämpfen, sind auch die Erdbeerpflanzer syndikiert.
Das Syndikat übernimmt den Verkauf. Also wird dort der Tagesertrag abgewogen und aufgespeichert. Oft noch am gleichen Abend, oder am darauffolgenden Morgen werden die Hunderte von Körbchen abgeholt durch grosse Geschäftscamionetten. Vielfach werden sie auch direkt an die Bahn gebracht, wo ihrer, - man sollte es nicht fur möglich halten, - manchmal ein ganzer Güterzug harrt. Sorgsam wird die süsse Ladung in die luftigen Waggons verstaut. Und Millionen Lothringer Erdbeeren « rollen in die Welt ». In diesem Tempo geht es mehrere Wochen weiter in Woippy und der Name des fast unbedeutenden Dorfes ist auf Bahnhöfen in grossen Städten zu lesen. Vor einigen Jahren noch erfolgte der Transport überhaupt nur durch die Bahn. Heute, im Zeit-alter der Autos, ist es ein wenig anders. Da stehen fast allabendlich Camions und Camionetten vor dem Syndikat Schlange und warten der « süssen Last ».
Die Woippy-Erdbeeren sind weltbekannt. Das wird uns von kompetenter Seite und an Hand statistischen Materials überzeugend dargelegt. Züge gehen in Woippy ab in Richtung Luxembourg, Schweiz, Belgien, Paris und besonders in Richtung Saargebiet. Deutschland war vor dem Kriege der Hauptabnehmer der Woippy-Erdbeeren. Heute noch ist es das Saargebiet, und man wird verstehen, dass die Erdbeerpflanzer mit besonders grossem Interesse die Entwicklung der Saarfrage verfolgen. Ihnen liegt wohl weniger die Abstimmung am Herzen, als gute Wirtschaftsabkommen, die ihnen auch fernerhin erlauben würden, den Grossteil ihrer Erdbeerernte im Saargebiet abzusetzen. Statistiken sprechen Bände und sind zugleich der beste Beweis dafür, dass gerade unsere Grenzregion das grösste Interesse daran bat, das die ganze Saarfrage in freundschaftlicher Art aus der Welt geschafft werde.
Woippy erntet alljährlich weit über 600 Waggons Erdbeeren. Wenn wir als Merkwort « 600 » genommen, so stellt dies ungefähr das Mittel des Ertrages der letzten Jahre dar, der aber mit der Eisenbahn in alle Himmelsrichtungen versandt wurde. Wir zählen nicht dazu die vielen Camions und Camionetten, die Fuhrwerke, die besonders die angrenzenden Départements beliefern mit der süssen Frucht von Woippy. In guten Jahren darf mit 900 - 1 000 Waggons gerechnet werden. Diese Zahlen illustrieren, besser als lange Ausführungen, den Betrieb der z. Zeit der Erd-beerernte, im Monat Juni und Anfangs Juli, in dem kleinen Orte Woippy herrscht. Und man ist versucht hinzuzufügen, dieses Dorf ist eines der vielen Opfer der Berühmtheit geworden. Wir sind aber auch überzeugt, dass es die Bevölkerung gar nicht ungern sieht. Dieser rege Verkehr, dieses hastende Leben im Erdbeermonat in Woippy, das ist eben ein Stück Woippy. Und je grösser der Betrieb, je hastender das Leben und Arbeiten, umso mehr Freude und Zufriedenheit in den Familien. Die Müh' und Arbeit war dann nicht umsonst.
Nach all' diesem Hasten und Mühen, abends am Familientisch, erzählt uns ein biederer alter Landwirt von der Jahresarbeit an der Erdbeere. Nicht nur im « Ernte » - Monat heisst es arbeiten und sich abmühen. Nein, das ganze Jahr hindurch. Alte Stücke müssen ausgerottet, junge Pflanzen eingesetzt werden. Nach 6 Jahren müssen die Pflanzen ausgerottet werden, da sie nicht mehr tragfähig sind. Die neueingepflanzten dagegen tragen erst im 2. Jahre Früchte, sodass es gilt, alljährlich auszurotten und einzusetzen. Im Frühjahr muss das Unkraut dann dran glauben, denn nur in rein ausgeputztem und gejätetem Felde können Blüte und Frucht gedeihen. Später muss dann gestreut werden. Die Pflanzen müssen ringsum mit Mist belegt werden, damit die Früchte sich rascher und kräftiger entwickeln können. Mit der « Cueillette » aber wird der Höhepunkt erreicht, der die Hoffnungen der Pflanzer erfüllt und manchmal auch enttäuscht.
Die « Cueillette » wird z. Teil von der Pflanzerfamilie bewerkstelligt, besonders wenn sie mehrere Kinder zählt. Für die Jugend gibt es obendrein noch « Erdbeerferien », so wie es anderswo Ernte- oder Kartoffelferien gibt. Das Erdbeerpflücken wird aber auch für viele Familien aus der ganzen Umgebung zum Brotverdienst. Von den umliegenden Dörfern, ja aus der Stadt sogar kommen die « Filles des fraises », die « Erdbeermädels », die sich über die Pflücket bei den Pflanzerfamilien verdingen. Solange die « Ernte » währt, Solange bleiben die Mädchen und Frauen in Woippy bei ihrem Pflanzer. Sie wohnen und leben mit der Familie, so etwa wie dies im Elsass beim « Hopfen-Zopfen ». Usus ist. Und so wird aus einer guten Erdbeer-Ernte die Freude des Feinschmeckers und Käufers durch den billigen Verkaufspreis, der Wohlstand des Pflanzers durch einen günstigen Ertrag, das Glück vieler bedürftigen Familien durch den willkommenen Nebenverdienst bei der Pflücke. Möge dem auch heuer so sein !
Marinus

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